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Graphes dans les surfaces et ergodicité topologique

Dustin Connery-Grigg, François Lalonde et Jordan Payette Connery-Grigg: Département de mathématiques et de statistique, Université de Montréal, Montréal, Québec, Canada et Institut de Mathématiques de Jussieu-Paris Rive Gauche, Sorbonne Université, France. Lalonde: Département de mathématiques et de statistique, Université de Montréal, Montréal, Québec, Canada et Stanford University, CA, USA. Payette : Department of Mathematics and Statistics, McGill University, Montréal, Québec, Canada connery@imj-prg.fr; lalonde@dms.umontreal.ca;jordan.payette@mail.mcgill.ca
Abstract.

The simplest way to make a dynamical system out of a finite connected graph GG is to give it a polarization, that is to say a cyclic ordering of the edges incident to a vertex, for each vertex. The phase space 𝒫(G)\mathcal{P}(G) then consists of all pairs (v,e)(v,e) where vv is a vertex and ee is an edge incident to vv. Such an initial condition gives a position and a momentum. The data (v,e)(v,e) is of course equivalent to an edge endowed with an orientation e𝒪e_{\mathcal{O}}. With the polarization, each initial data leads to a leftward walk defined by turning left at each vertex, or making a rebound if there is no other edge. A leftward walk is called complete if it goes through all edges of GG, not necessarily in both directions. As usual, we define the valence of a vertex as the number of edges incident to it, and we define the valence of a graph as the average of the valences of its vertices. In this article, we prove that if a graph which is embedded in a closed oriented surface of genus gg admits a complete leftward walk, then its valence is at most 1+6g+11+\sqrt{6g+1}. We prove furthermore that this result is sharp for infinitely many genera gg, and that it is asymptotically optimal as g+g\to+\infty. This leads to obstructions for the embeddability of graphs on a surface in a way which admits a complete leftward walk. Since checking that a polarized graph admits a complete leftward walk or not is done in time 4N4N, where NN is the cardinality of the edges (we just have to check it on both orientations of any given edge), this obstruction is particularly efficient in terms of computability. This problem has its origins in interesting consequences for what we will call here the topological ergodicity of conservative systems, especially Hamiltonian systems HH in two dimensions where the existence of a complete leftward walk corresponds to a topologically ergodic orbit of the system, i.e. an orbit of HH visiting all the topology of the surface. We limit ourselves here to two dimensions, but generalisations of this theory should hold for autonomous Hamiltonian systems on a symplectic manifold of any dimension.


RÉSUMÉ. La façon la plus simple de faire d’un graphe fini connexe GG un système dynamique est de lui donner une polarisation, c’est-à-dire un ordre cyclique des arêtes incidentes à chaque sommet. L’espace de phase 𝒫(G)\mathcal{P}(G) d’un graphe consiste en toutes les paires (v,e)(v,e)vv est un sommet et ee une arête incidente à vv. Elle donne donc la position et le vecteur initiaux. Une telle condition est équivalente à une arête que l’on munit d’une orientation e𝒪e_{\mathcal{O}}. Avec la polarisation, chaque donnée initiale mène à une marche à gauche en tournant à gauche à chaque sommet rencontré, ou en rebondissant s’il n’y a en ce sommet aucune autre arête. Une marche à gauche est appelée complète si elle couvre toutes les arêtes de GG (pas nécessairement dans les deux sens). Nous définissons la valence d’un sommet comme le nombre d’arêtes adjacentes à ce sommet, et la valence d’un graphe comme étant la moyenne des valences de ses sommets. Dans cet article, nous démontrons que si un graphe plongé dans une surface orientée fermée de genre gg possède une marche à gauche complète, alors sa valence est d’au plus 1+6g+11+\sqrt{6g+1}. Nous prouvons de plus que ce résultat est optimal pour une infinité de genres gg et qu’il est asymptotiquement optimal lorsque g+g\to+\infty. Cela mène à des obstructions pour les plongements de graphes sur une surface. Puisque vérifier si un graphe polarisé possède ou non une marche à gauche complète s’opère en temps au plus 4N4N, où NN est le nombre d’arêtes (il suffit de le vérifier sur les deux orientations d’une seule arête donnée), cette obstruction est particulièrement efficace. Ce problème trouve sa motivation dans ses conséquences intéressantes sur ce que nous appellerons ici l’ergodicité topologique d’un système conservatif, par exemple un système hamiltonien H en dimension deux où l’existence d’une marche complète à gauche correspond à une orbite du système topologiquement ergodique, donc une orbite qui visite toute la topologie de la surface. Nous nous limitons ici à la dimension 22, mais une généralisation de cette théorie devrait tenir pour des systèmes hamiltoniens autonomes sur une variété symplectique de dimension arbitraire.

Le premier auteur est soutenu par une bourse doctorale du Fonds de recherche du Québec – Nature et technologie (FRQNT) et par une bourse postdoctorale de la Fondation des sciences mathématiques de Paris (FSMP). Le second est soutenu par le programme des chaires de recherches du Canada en géométrie et topologie symplectiques et par une subvention du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG). Le troisième est soutenu par une bourse postdoctorale du FRQNT









Subject classification: 05C10, 05C21, 37B02, 55N10, 57Q35, 68R01.


1. Introduction

Dans cet article, nous établissons des conditions nécessaires optimales pour l’existence d’une « longue orbite », appelée ici marche complète, dans la dynamique des marches à gauche canoniquement définie dans tout graphe plongé dans une surface orientée fermée111Nos résultats s’étendent facilement au cas de graphes plongés dans des surfaces orientées obtenues par épointage de surfaces fermées.. En employant des termes définis subséquemment dans cette introduction, notre résultat phare s’énonce comme suit :

Théorème. Soient Σ\Sigma une surface fermée orientée de genre gg et GΣG\subset\Sigma un graphe ordinaire plongé qui est le 11-squelette d’une décomposition cellulaire de Σ\Sigma. Si GG (muni de sa polarisation induite) possède une marche à gauche complète, alors la valence moyenne V=2A/SV=2A/S de GG satisfait l’inégalité V1+6g+1V\leq 1+\sqrt{6g+1}. Cette inégalité est saturée pour une infinité de gg, notamment pour tous les g4g\geq 4 de la forme (S1)(S3)/6(S-1)(S-3)/6S 7 mod 12S\,\equiv\,7\mbox{ mod }12 est un nombre premier. De plus, cette inégalité est asymptotiquement optimale dans la limite g+g\to+\infty, au sens où pour tout gg assez grand, il existe un graphe GgΣgG_{g}\subset\Sigma_{g} tel que V(Gg)=6g+o(g)V(G_{g})=\sqrt{6g}+o(\sqrt{g}).

L’inégalité ci-dessus découle aisément de la formule exprimant la caractéristique de Descartes–Euler de Σ\Sigma comme étant la somme alternée des nombres de Betti de la décomposition cellulaire de Σ\Sigma associée au graphe GG. La difficulté du Théorème réside ainsi surtout dans ses énoncés d’optimalité. Notre démonstration de la saturation de l’inégalité pour les gg listés consiste en la construction de polarisations explicites appropriées pour les graphes complets à SS sommets (où S7 mod 12S\equiv 7\mbox{ mod }12 est premier), construction qui repose sur les systèmes de triples de Steiner produits par Skolem et par O’Keefe [S2, O]. L’optimalité asymptotique de l’inégalité résulte quant à elle du fait précédent, d’un résultat de Baker–Harman–Pintz [BHP] sur la répartition des nombres premiers congruents à 7 mod 127\mbox{ mod }12 et d’une opération de somme connexe sur les paires (Σg,Gg)(\Sigma_{g},G_{g}) qui permettent de définir les graphes appropriés GgΣgG_{g}\subset\Sigma_{g} récursivement sur gg.

La motivation derrière notre étude des graphes polarisés qui possèdent une marche complète vient de la possibilité de réduire l’étude qualitative des systèmes dynamiques dans une surface à de la combinatoire définie sur un squelette de celle-ci. Par exemple, étant donné un graphe plongé dans une surface orientée qui soit le 11-squelette d’une décomposition cellulaire de la surface, alors la dynamique des marches à gauche induite dans le graphe peut servir d’approximation pour la dynamique hamiltonienne d’un hamiltonien HH défini sur la surface et ayant ledit graphe pour ensemble de niveau. Dans ce cas, la présence d’une marche complète sur le graphe implique l’existence d’une orbite hamiltonienne topologiquement ergodique, c’est-à-dire d’une orbite qui intersecte tous les lacets non contractiles de la surface. Le concept d’ergodicité topologique étant intermédiaire entre celui de système intégrable et celui de système ergodique, il s’agit d’un concept intéressant pour l’étude des hamiltoniens rencontrés génériquement. La présence d’une marche à gauche complète dans un graphe de niveau connexe et cellulaire apparaît alors comme une manière utile et efficace d’attester de l’ergodicité topologique de certains hamiltoniens.

1.1. Notions préalables

Soit un graphe GG (qui contient possiblement des boucles ou de multiples arêtes entre deux sommets). GG est ordinaire ou simple s’il n’a aucun cycle de longueur 11 ou 22, et il est généralisé sinon. Nous supposerons toujours que GG est généralisé, fini et connexe, à moins d’une mention explicite du contraire.

Nous notons 𝒮(G)\mathcal{S}(G) l’ensemble des sommets de GG, S=S(G)S=S(G) la cardinalité de 𝒮(G)\mathcal{S}(G) (c’est-à-dire, le nombre de sommets dans GG), 𝒜(G)\mathcal{A}(G) l’ensemble des arêtes (non orientées) de GG et A=A(G)A=A(G) la cardinalité de 𝒜(G)\mathcal{A}(G) (c’est-à-dire, le nombre d’arêtes dans GG). Nous définissons l’espace de phase associé au graphe GG comme étant l’ensemble 𝒫(G)\mathcal{P}(G) des arêtes orientées de GG, soit encore l’ensemble des demi-arêtes de GG. De manière équivalente, 𝒫(G)\mathcal{P}(G) est l’ensemble des paires dont la première composante est un sommet et la seconde est une arête incidente à ce sommet, d’où le nom « espace de phase », car la position et le moment sont donnés comme conditions initiales.

Une polarisation PP de GG est la donnée pour tout p𝒮(G)p\in\mathcal{S}(G) d’un ordre cyclique sur les arêtes orientées basées en pp. Un graphe polarisé est une paire (G,P)(G,P). Etant donné (G,P)(G,P), nous obtenons une dynamique « des marches à gauche »222Nous parlerons parfois de « la marche à gauche sur GG » pour désigner l’ensemble de la dynamique. sur l’espace de phase GG via l’application τ=τ(G,P):𝒫(G)𝒫(G)\tau=\tau_{(G,P)}:\mathcal{P}(G)\to\mathcal{P}(G) donnée par τ((o,p))=(p,q)\tau((o,p))=(p,q)(p,q)(p,q) est l’arête orientée qui suit l’arête (p,o)(p,o) dans l’ordre cyclique des arêtes basées en pp. Géométriquement, la dynamique est donnée par la prescription suivante : en arrivant au sommet pp via l’arête (o,p)(o,p), il s’agit de « tourner à gauche » pour emprunter l’arête (p,q)(p,q). Si l’on arrive à un sommet qui ne contient que l’arête d’arrivée, la dynamique prescrit de rebondir au sommet et de rebrousser chemin le long de la même arête333Comme on suit alors la même arête en sens opposé, on retourne au sommet précédent ; tourner à gauche a l’effet, en ce sommet précédent, de suivre la seconde arête à gauche de celle qui avait mené à ce sommet précédemment. En d’autres termes, un sommet qui n’a qu’une seule arête est un élément neutre et peut moralement être supprimé aussi bien que l’arête qui y mène..

Nous notons (G)\mathcal{F}(G) l’ensemble des orbites de la dynamique induite par PP et F=F(G,P)F=F(G,P) la cardinalité de (G)\mathcal{F}(G) (c’est-à-dire, le nombre de marches à gauche). Nous définissons la caractéristique d’Euler du graphe polarisé (G,P)(G,P) par

χ=χ(G,P):=SA+F.\chi=\chi(G,P):=S-A+F\,.

Il s’avère que ce nombre est pair et vaut au maximum 22 [HR, Theorem 10.1.2]. Nous définissons le genre du graphe polarisé (G,P)(G,P) comme étant

γ:=g(G,P):=1χ(G,P)2.\gamma:=g(G,P):=1-\dfrac{\chi(G,P)}{2}\,.

Observons qu’un graphe GG plongé dans une surface orientée Σ\Sigma hérite d’une polarisation PP induite par l’orientation de Σ\Sigma. Nous disons alors que le plongement ϕ:(G,P)Σ\phi:(G,P)\to\Sigma est polarisé ; nous dirons parfois simplement que le plongement ϕ:GΣ\phi:G\to\Sigma est polarisé lorsque la polarisation PP sur GG est sous-entendue. Un plongement ϕ:GΣ\phi:G\to\Sigma est cellulaire si ΣG\Sigma\setminus G est une union disjointe de 22-cellules ouvertes. Le théorème fondamental des plongements polarisés, démontré en toute rigueur par Youngs [Y], implique que toute polarisation PP sur GG est induite par un plongement cellulaire de GG dans une surface :

Théorème 1.1 (Théorème fondamental).

Soient (G,P)(G,P) un graphe polarisé et Σg\Sigma_{g} une surface fermée orientée de genre gg. Il existe un plongement polarisé ϕ:GΣg\phi:G\to\Sigma_{g} si et seulement si

χ(G,P)χ(Σg)=22g.\chi(G,P)\geq\chi(\Sigma_{g})=2-2g\,.

De plus, l’égalité a lieu si et seulement si le plongement polarisé ϕ\phi est cellulaire.

L’idée essentielle, que nous emploierons ailleurs dans l’article, consiste à utiliser les marches à gauche déterminées par la polarisation PP comme données de recollement des bords de FF 22-cellules ouvertes le long du graphe GG afin d’obtenir une surface orientée fermée Σγ\Sigma_{\gamma}.

Notre attention dans cet article est surtout portée vers les graphes polarisés qui admettent une marche à gauche complète, c’est-à-dire une marche à gauche qui emprunte chaque arête (non orientée) de GG au moins une fois. (Nous désignerons la marche complète simplement par le sigle MC ; toutes les autres marches à gauche sont dites non complètes444Il existe des graphes polarisés (G,P)(G,P) qui ont deux marches à gauche complètes. Pour ceux-ci, nous désignons arbitrairement l’une des deux marches comme MC et l’autre comme MNC. et désignées simplement par le sigle MNC.) L’un des principaux intérêts pour l’étude des marches complètes se trouve dans le fait qu’elles sont étroitement liées à une propriété dynamique que nous nommons ergodicité topologique :

Définition 1.2.

Soit W:IΣW:I\to\Sigma un chemin continu dans une surface Σ\Sigma de genre g1g\geq 1. Nous disons que WW est topologiquement ergodique si l’image de WW croise l’image de tout lacet non contractile dans WW.

Proposition 1.3.

Soient GΣG\subset\Sigma un graphe connexe plongé cellulairement dans une surface fermée orientée de genre g1g\geq 1 et WW une marche à gauche complète de GG pour la polarisation induite par Σ\Sigma. Alors WW est topologiquement ergodique.

Proof.

Soit α\alpha un lacet non contractile dans Σ\Sigma. Puisque le graphe est cellulaire et l’image de α\alpha est connexe, il en résulte que l’image de α\alpha intersecte GG. Or la marche complète visite toutes les arêtes du graphe, donc WαW\cap\alpha est non vide.   \square

En fait, il y a une certaine réciproque à cette proposition : si un graphe plongé GΣG\subset\Sigma possède une marche à gauche WW qui est topologiquement ergodique, alors GG est plongé cellulairement. De plus, si GGG^{\prime}\subset G dénote le sous-graphe parcouru par WW, alors WW est une marche à gauche complète pour GG^{\prime}. Nous voyons donc que les graphes cellulaires qui possèdent une marche complète sont les exemples minimaux de graphes plongés admettant une marche topologiquement ergodique.

1.2. Principaux résultats

Dans cet article, nous identifions des conditions qu’un graphe plongé cellulairement dans une surface doit satisfaire afin d’admettre une marche à gauche complète. Nos principaux résultats établissent des bornes supérieures – essentiellement optimales – sur les valences moyennes que de tels graphes peuvent avoir en fonction du genre gg de la surface Σ\Sigma dans laquelle ils sont plongés.

L’existence de telles inégalités est toutefois contrainte par des situations comme celle présentée dans la fig. 1  : disposer un nombre arbitraire de lacets à un sommet les uns après les autres n’affecte pas l’existence d’une marche complète, mais permet d’élever la valence totale moyenne au-dessus de toute valeur.

Afin de contourner ce problème, nous explorons deux stratégies :

  1. (1)

    La première ne considère que les graphes homotopiques, où une condition homotopique vient contraindre les graphes plongés étudiés.

  2. (2)

    La seconde utilise la valence réduite moyenne plutôt que la valence totale moyenne, où un compte différent de la valence permet de cerner les contraintes pertinentes imposées par la présence d’une marche complète.

Soulignons que les graphes ordinaires sont homotopiques et que leur valence réduite coïncide avec leur valence totale ; ces graphes sont donc couverts par les deux stratégies.

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Figure 1.

1.2.1. Graphes homotopiques

Définition 1.4.

Etant donné un entier S1S\geq 1, un SS-graphe GG est un graphe formé de SS sommets et d’un nombre arbitraire fini d’arêtes et de lacets entre ses sommets. C’est un monographe si S=1S=1. Un SS-graphe plongé dans une surface Σ\Sigma est dit homotopique si (i) aucun lacet de GG n’est contractile et si (ii) pour chaque paire d’arêtes ee et ff entre deux mêmes sommets, le lacet ef¯e\overline{f} n’est pas contractile.

Un premier intérêt de considérer les monographes cellulaires homotopiques tient au fait que nous avons un théorème optimal les concernant :

Théorème 1.5.

Soit GG un monographe homotopique plongé dans une surface orientée fermée de genre gg. Si GG possède une marche à gauche complète, alors le nombre de lacets est au plus 3g3g. Ce résultat est optimal (sharp) puisque cette borne est réalisée.

Il convient de comparer ce résultat au nombre maximal de lacets d’un monographe homotopique, sans demander qu’il y ait une marche complète (une preuve est fournie dans annexe A pour le lecteur intéressé):

Proposition 1.6.

Soit C(g)C(g) le nombre maximal de lacets, tous passant par le même point pp d’une surface orientable fermée de genre gg, tous plongés et disjoints deux à deux sauf en pp, et représentant des classes non nulles en homologie et toutes différentes. Alors C(g)=6g3C(g)=6g-3.

Nous constatons donc que l’exigence d’une marche complète divise grosso modo par 22 le nombre de lacets.

En fait, nous démontrerons le résultat suivant, dont découle le 1.5 lorsque S=1S=1 :

Théorème 1.7.

Soient S1S\geq 1 et GG un SS-graphe homotopique plongé dans une surface orientée fermée de genre gg. Si GG possède une marche à gauche complète, alors le nombre d’arêtes est au plus 3g+3(S1)23g+\left\lfloor\dfrac{3(S-1)}{2}\right\rfloor. Ce résultat est optimal puisque cette borne est réalisée.

Un second intérêt de considérer les monographes cellulaires homotopiques tient au fait qu’ils peuvent souvent servir de point de départ pour la construction de graphes ordinaires à marche à gauche complète et optimaux grâce à l’application d’opérations appropriées sur les graphes que nous décrivons à la section 2. Nous exemplifions ce fait dans la section 5.

1.2.2. Valences réduites des graphes généralisés

Définition 1.8.

Soit un graphe généralisé GG. La valence (totale) en un sommet vGv\in G, notée V(G)vV(G)_{v}, est la somme des arêtes incidents à vv. Nous définissons alors la valence (totale) moyenne de GG comme étant la moyenne des valences de ses sommets, V(G):=(1/S)vGV(G)v=2A/SV(G):=(1/S)\sum_{v\in G}V(G)_{v}=2A/S.

Définition 1.9.

Étant donné un graphe généralisé GG, un sous-graphe réduit de GG est un sous-graphe GrG_{r} de GG qui a les mêmes sommets que GG, qui n’a aucun lacet et qui a exactement une arête (issue de GG) entre n’importe quel deux points distincts v,wGv,w\in G qui sont liés par au moins une arête dans GG. Tous les sous-graphes réduits de GG sont des graphes ordinaires et ils ont tous le même nombre d’arêtes ; le nombre d’arête réduit de GG, noté Ar(G)A_{r}(G), est le nombre d’arêtes d’un sous-graphe réduit. La valence réduite en un sommet vGv\in G est Vr(G)v:=V(Gr)vV_{r}(G)_{v}:=V(G_{r})_{v} ; la valence réduite moyenne de GG est Vr(G):=(vGVr(G)v)/S(G)=2Ar(G)/S(G)V_{r}(G):=(\sum_{v\in G}V_{r}(G)_{v})/S(G)=2A_{r}(G)/S(G).

Pour g0g\geq 0, définissons V(g)V(g) comme étant le supremum de Vr(G)V_{r}(G) parmi les GG généralisés plongés dans Σg\Sigma_{g} et ayant une MC. Définissons Vc(g)V_{c}(g) similairement, mais en imposant que GΣgG\subset\Sigma_{g} soit plongé cellulairement. Il est clair que Vc(g)V(g)V_{c}(g)\leq V(g), tandis que le théorème fondamental implique V(g)=max0hgVc(h)V(g)=\mathrm{max}_{0\leq h\leq g}\,V_{c}(h). Nous montrerons (voir 5.5) que Vc(g)V_{c}(g) est toujours réalisé pour g1g\geq 1, c’est-à-dire qu’il existe un graphe polarisé (G,P)(G,P) gg-optimal, à savoir un graphe (G,P)(G,P) qui a une MC, qui satisfaisait γ=g\gamma=g et V(G)=Vc(g)V(G)=V_{c}(g).

Notre premier théorème présente des bornes sur Vc(g)V_{c}(g) pour tout g0g\geq 0. Ci-dessous, tandis que x0\lceil x\rceil_{0} et x1\lceil x\rceil_{1} désignent respectivement les plus petits entiers pair et impair plus grands ou égaux à xx et que x0\lfloor x\rfloor_{0} et x1\lfloor x\rfloor_{1} désignent respectivement les plus petits entiers pair et impair plus petits ou égaux à xx.

Théorème 1.10.

Pour g=0g=0, Vc(0)=3V_{c}(0)=3 et n’est réalisé par aucun graphe. Pour g1g\geq 1, Vc(g)V_{c}(g) est réalisé et satisfait les inégalités

4(1+13g)1Vc(g)br(g)b(g):=1+1+6g,4\,\left(1+\dfrac{1}{3g}\right)^{-1}\leq V_{c}(g)\leq b_{r}(g)\leq b(g):=1+\sqrt{1+6g}\,,

br(g):=max{S0(g)01,S1(g)11, 3+6g4S0(g)0, 3+6g3S1(g)1}b_{r}(g):=\mathrm{max}\,\left\{\,\lfloor{S_{0}(g)}\rfloor_{0}-1\,,\,\lfloor{S_{1}(g)}\rfloor_{1}-1\,,\,3+\dfrac{6g-4}{\lceil S_{0}(g)\rceil_{0}}\,,\,3+\dfrac{6g-3}{\lceil S_{1}(g)\rceil_{1}}\right\}

et Sj(g):=2+6g+jS_{j}(g):=2+\sqrt{6g+j} pour j=0, 1j=0,\,1.

Nous avons calculé les valeurs de Vc(g)V_{c}(g) pour 0g50\leq g\leq 5 :

Lemme 1.11.

Nous avons Vc(1)=337V_{c}(1)=3\frac{3}{7}, Vc(2)=br(2)=413V_{c}(2)=b_{r}(2)=4\frac{1}{3}, Vc(3)=br(3)=517V_{c}(3)=b_{r}(3)=5\frac{1}{7}, Vc(4)=b(4)=6V_{c}(4)=b(4)=6 et Vc(5)=br(5)=614V_{c}(5)=b_{r}(5)=6\frac{1}{4}. Toutes ces valeurs sont réalisées par des graphes ordinaires.

Disons qu’un genre gg est maximisé si Vc(g)=br(g)V_{c}(g)=b_{r}(g) et super-maximisé si Vc(g)=b(g)V_{c}(g)=b(g). Le lemme précédent suggère qu’il est ardu en général d’établir si un genre gg est maximisé, super-maximisé ou pas. Notre prochain théorème montre l’optimalité de nos bornes supérieures :

Théorème 1.12.
  1. (a)

    Vc(g)<br(g)V_{c}(g)<b_{r}(g) pour une infinité de gg, notamment tous les g=6k2g=6k^{2}k>0k\in\mathbb{Z}_{>0}.

  2. (b)

    Vc(g)=b(g)V_{c}(g)=b(g) pour une infinité de gg, notamment tous les g=(S1)(S3)/6g=(S-1)(S-3)/6S7mod 12S\equiv 7\,\mathrm{mod}\,12 est un nombre premier, ainsi que pour S=9S=9.

La première partie de ce résultat repose sur le fait que pour les gg cités, la borne br(g)b_{r}(g) est égale à S0(g)01\lfloor S_{0}(g)\rfloor_{0}-1 et à 3+6g4S0(g)03+\dfrac{6g-4}{\lceil S_{0}(g)\rceil_{0}}. Or, les graphes (réduits) qui réalisent la première borne sont des graphes complets sur un nombre pair de sommets, tandis les graphes (réduits) qui réalisent la deuxième borne possèdent plusieurs sommets de valence paire. Puisque ces deux propriétés sont incompatibles, aucun graphe ne réalise br(g)b_{r}(g) si g=6k2g=6k^{2}.

La deuxième partie de ce résultat émane de l’observation simple selon laquelle si gg est super-maximisé, alors tout graphe gg-optimal GG est isomorphe à un graphe complet KSK_{S} sur S=S(g)=2+1+6gS=S(g)=2+\sqrt{1+6g} sommets, où forcément S1 ou 3mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\,\mathrm{mod}\,6. Plus encore, la MC sur GG est alors un cycle eulérien, tandis que les MNC déterminent un système de triplets de Steiner sur 𝒮(G)\mathcal{S}(G), c’est-à-dire qu’elles partitionnent l’ensemble 𝒜(G)\mathcal{A}(G) en triplets disjoints. La démonstration du théorème consiste donc à construire des polarisations judicieuses pour les graphes complets KS(g)K_{S(g)} à partir de systèmes de triples de Steiner convenables, tâche que nous accomplissons pour les gg mentionnés. Il semble toutefois plausible que la Conjecture suivante tienne :

Conjecture 1.13.

Vc(g)=b(g)V_{c}(g)=b(g) si g=(S1)(S3)/64g=(S-1)(S-3)/6\geq 4S1 ou 3mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\,\mathrm{mod}\,6.

Finalement, en raison du 1.12(b), de l’apparition fréquente des nombres premiers congruents à 7 modulo 12 [BHP, Theorem 3] et de l’opération de somme connexes de surfaces avec graphes plongés, nous montrons que la borne b(g)b(g) est asymptotiquement optimale  :

Théorème 1.14.
Vc(g)=6g+o(g) (g+.V_{c}(g)=\sqrt{6g}+o(\sqrt{g})\quad\mbox{ ($g\to+\infty$) }\,.

En fait, nous montrerons Vc(g)=6g+O(g9/20)V_{c}(g)=\sqrt{6g}+O(g^{9/20}). Un raffinement de notre argumentation pourrait fournir un exposant quelque peu meilleur que 9/209/20, mais la validité de la 1.13 impliquerait un terme d’erreur encore meilleur.

1.3. Quelques problèmes connexes

Nous terminons le survol de cet article en mentionnant quelques problèmes soulevés par notre travail et qui pourront faire l’objet d’investigations futures.

1.3.1. Premier problème - Conjecture d’optimalité

Il s’agit de mieux comprendre l’ensemble des genres g1g\geq 1 pour lesquels Vc(g)=b(g)V_{c}(g)=b(g). La 1.13 revient à annoncer que la condition nécessaire g=(S1)(S3)/6g=(S-1)(S-3)/6S 1 ou 3 mod 6S\,\equiv\,1\mbox{ ou }3\mbox{ mod }6 avec S7S\geq 7 est en fait une condition suffisante. En raison du 1.12(b) et de quelques autres solutions disparates que nous n’avons pas incluses dans cet article, nous croyons que cette conjecture soit correcte.

1.3.2. Deuxième problème - Relations aux systèmes dynamiques surfaciques

Bien que nous ayons décidé de présenter notre théorie en termes combinatoires et seulement en dimension deux pour rendre l’article le plus compact possible, les motivations et les conséquences de nos résultats sont liées à deux situations dynamiques que nous présentons succinctement ici :

(1) Jeu de billard. Si GG est un graphe plongé dans une surface de genre quelconque, remplaçons chaque sommet par un domaine convexe et chaque arête par un col hyperbolique. Cela donne lieu à un domaine DD de la surface. Chaque lancement d’une boule de billard depuis l’un des domaines convexes lui fait parcourir un chemin qui ne peut pas s’engouffrer éternellement dans un col (par hyperbolicité). Un tel chemin donne ainsi lieu à une marche dans le graphe, lorsque projeté sur celui-ci. La théorie que nous présentons ici correspond alors au cas particulier quand la boule traverse chaque col qu’elle croise et ressort de chaque domaine par le col immédiatement à gauche du col par lequel elle est arrivée, ou revient sur elle-même quand il n’y a qu’un col. En ce sens, cet article aborde la partie combinatoire, alors que le jeu de billard classique sur une table convexe aborde la partie analytique. Bien entendu, un domaine régulier quelconque d’une surface n’est pas nécessairement l’épaississement d’un graphe en parties convexes et hyperboliques, mais c’est un premier cas intéressant qui n’est pas hors d’atteinte.

(2) Dynamique hamiltonienne et théorie du contrôle. Soit HH un hamiltonien défini sur une surface orientée de genre quelconque. Il y définit une dynamique dont la nature qualitative a un grand intérêt. Supposons maintenant que HH soit générique au sens suivant : il possède un nombre fini de points critiques et chacun d’entre eux est une singularité dont la profondeur est finie. Les fonctions de Morse sont trivialement génériques en ce sens, mais ne sont pas les plus intéressantes car dans le cas général les singularités s’expriment en cartes locales par des polynômes génériques à deux variables de degré arbitraire. Prenant maintenant une valeur critique cc de HH, la préimage de cc est, sous des hypothèses raisonnables, un graphe dont la valence en chaque sommet (identifié à un point critique de valeur critique cc) est donnée par la profondeur du point critique. Dans ce cas, et comme le gradient symplectique de HH tourne toujours à gauche, la dynamique de l’hypersurface H1(c)H^{-1}(c) est approximée C0C^{0} par la marche à gauche sur ce graphe GHG_{H} (C0C^{0} près des points critiques et C1C^{1} partout ailleurs). En particulier, toute caractéristique qualitative de cette orbite est contenue dans la marche à gauche sur GHG_{H}. Comme il est facile de voir si cette marche est complète, et puisque que toute marche complète est topologiquement ergodique lorsque le graphe est plongé cellulairement, l’orbite de HH passant par ce point critique est topologiquement ergodique dans ce cas. Moralement, cette orbite visite toute la topologie de la surface. En théorie du contrôle, cela permet de lancer un vaisseau spatial (ici en dimension 22) en utilisant cette orbite, de n’importe quel point de la surface vers n’importe quel autre point, en y adjoignant un nombre fini de petits hamiltoniens qui correspondent, dans notre exemple, à une contribution des moteurs du vaisseau, avec la plus petite énergie possible. Un autre exemple est la trajectoire d’un électron sur une surface métallique, soumis à un champ magnétique, dont les corrections de trajectoire sont produites par de faibles champs électriques [N, MN].

1.3.3. Troisième problème - Généralisation aux dimensions supérieures

Il y a deux façons, également intéressantes, de généraliser la notion de graphe plongé dans une surface aux variétés symplectiques de dimension arbitraire. La première est de considérer un graphe dans une surface comme un squelette d’hypersurfaces se rencontrant en des sous-variétés coisotropes ou symplectiques. La seconde est de considérer un graphe dans une surface dont le squelette est fait de sous-variétés lagrangiennes sur lequel se rétracte la variété, ce qui arrive dans les variétés de Weinstein.

1.4. Relation à la littérature

Le problème général de plongement de graphes dans des surfaces de genre arbitraire a donné lieu à une littérature abondante et est le sujet du chapitre 10 du livre de Hartsfield et Ringel [HR] et de la monographie de Mohar et Thomassen [MT].

Le problème que nous abordons dans cet article est celui des marches complètes sur des graphes polarisés, et donc en particulier sur les graphes plongés dans une surface. Ce problème tire son origine de celui, fondamental, de la discrétisation des systèmes dynamiques hamiltoniens. Cet article est, nous l’espérons, une première étape importante vers la résolution de cette discrétisation.

Or il se trouve que la question des marches (à gauche disons) complètes n’a pas, à ce jour, attiré l’attention des experts en théorie des graphes, peut-être parce que l’accent chez ces experts était davantage porté sur des questions, certes naturelles, qui ne font pas intervenir la dynamique. Il nous fallait donc construire cette nouvelle théorie, plus ou moins à partir de zéro.

C’est ainsi que notre attention s’est naturellement portée vers le problème de la valence moyenne maximale que peut posséder un graphe avec marche complète plongé cellulairement dans une surface donnée. Dans cette approche, la surface a préséance sur le graphe. Il s’agit d’une situation différente de celle que l’on trouve habituellement dans la littérature, où c’est plutôt un graphe qui est donné d’entrée de jeu et pour lequel on cherche une polarisation qui le plonge d’une manière particulière dans une surface (la présence d’une marche complète n’étant cependant jamais une condition imposée).

Par exemple, deux problèmes notables abordés dans la littérature sont ceux du genre minimal et du genre maximal d’une surface dans lequel un graphe peut se plonger cellulairement (nous renvoyons au livre de Mohar et Thomassen [MT] pour des détails sur les résultats obtenus à leur propos). Ces deux problèmes sont généralement différents du nôtre, comme l’illustre le cas du graphe complet à 7 sommets G=K7G=K_{7}. En effet, nous avons établi qu’il s’agit du graphe de plus grande valence moyenne à se plonger dans la surface de genre 4 en ayant une marche complète (Propositions 5.10 et 6.1). De plus, K7K_{7} n’admet aucun plongement cellulaire avec marche complète dans une surface de genre g3g\leq 3, et il n’est pas le graphe de plus grande valence moyenne avec marche complète dans les surfaces de genre g5g\geq 5. Or les genres minimaux et maximaux des graphes complets sont connus : selon Ringel et Young [HR][Theorem 10.3.6], le genre minimal de K7K_{7} est g=1g=1 (un plongement explicite est donné par [HR][Figure 10.3.7]), tandis que son genre maximal est g=7g=7 en vertu du résultat de Nordhaus, Stewart et White [NSW].

Observons aussi qu’un graphe polarisé avec une marche complète qui n’a qu’une ou deux marches s’apparente à un graphe supérieurement plongé (traduction libre du terme anglais upper-embedded graph introduit par Ringeisen [R]), c’est-à-dire à un graphe dont les plongements cellulaires dans la surface de genre maximal associée ne possèdent qu’une ou deux faces. Évidemment, les graphes polarisés n’ayant qu’une seule marche (forcément complète) coïncident avec les graphes plongés à une seule face. Toutefois, un graphe supérieurement plongé avec deux faces peut n’avoir aucune marche complète : pensons au graphe formé (après une subdivision appropriée des arêtes) par l’union de deux méridiens et d’un cercle de latitude dans le tore. Plus généralement, la question se pose quant à savoir si un graphe polarisé avec marche complète est supérieurement plongeable, c’est-à-dire s’il admet une (autre) polarisation qui le plonge supérieurement dans une (autre) surface. La réponse à cette question est négative : les « bouquets » considérés dans la fig. 1, ou leurs variantes ordinaires considérées dans [NSW, Figure 1], ne peuvent être plongés cellulairement que dans la sphère et ne sont ainsi pas supérieurement plongeables.

Toutefois, la question prend une tournure intéressante lorsqu’elle est posée pour les graphes polarisés avec marche complète qui maximisent la valence moyenne en un genre donné : un tel graphe admet-il une (autre) polarisation qui le plonge supérieurement dans une (autre) surface ? Soulignons que les graphes optimaux explicites des sections 5 et 6 admettent tous, par inspection, un arbre couvrant dont le complément est connexe, de sorte qu’ils sont tous supérieurement plongeables par le théorème principal de cet article de Jungerman [J]. Heuristiquement, le fait qu’un graphe ait une valence moyenne élevée ouvre la voie à ce qu’il ait aussi une arête-connexité élevée ; or, Jungermann (Loc. cit) a montré que tout graphe 4-arête-connexe est supérieurement plongeable. Ainsi, il est plausible que cette nouvelle question admette une réponse positive.

1.5. Structure de l’article

Voici la structure de cet article. Dans la section 2, nous présentons plusieurs opérations sur les graphes avec des marches à gauche (complètes) qui modifient les graphes et les marches de diverses manières contrôlées. Ces opérations sont utiles pour construire divers graphes optimaux qui saturent les bornes indiquées dans nos résultats. Dans la section 3, nous prouvons le 1.7. La section 4 établit quelques inégalités fondamentales entre la valence (resp. valence réduite), le nombre de sommets et le genre d’un graphe ayant une marche à gauche complète et aucune marche à gauche “courte”. La section 5 contient une preuve du 1.10 dans la section 5.2 et la section 5.3 présente les exemples optimaux attestés par le 1.11. Dans la section 6, nous prouvons le 1.12, tandis que la section 7 contient une preuve du 1.14. L’annexe A présente un calcul de l’invariant C(g)C(g) pour le lecteur intéressé.


Remerciements. Nous sommes reconnaissants à Steven Boyer de nous avoir communiqué, dès le début de ce travail, une preuve simple et lumineuse d’un résultat classique sur le nombre maximal de lacets plongées disjoints et homotopiquement différents dans surface de genre arbitraire, et à François Bergeron pour une conversation sur la combinatoire algébrique. Nos remerciements vont à Jacob Fox et à Yakov Eliashberg pour des discussions fructueuses. Nous sommes reconnaissants à Thomas Parker de nous avoir suggéré d’étudier la topologie de 1-courants sur l’espace des graphes. Nous sommes reconnaissants à Eliane Cody d’avoir suggéré et étudié cette théorie pour des graphes infinis, en particulier pour le H-tree. Bien que cela n’entre pas dans le contexte de cet article, nous la remercions pour cette étude et sa contribution indirecte. Le second auteur remercie le Département de mathématique de l’Université Stanford pour son soutien lors de la présentation à l’automne 2022 d’une suite de conférences “Distinguished Lecture Series” portant sur cet article. Nous remercions également le référé pour de nombreuses suggestions sur les relations éventuelles de ce travail avec certains modèles de surfaces aléatoires et sur un traitement plus combinatoire des marches à gauche. Bien que ces idées nous semblent intéressantes, il ne nous a pas semblé possible de les ajouter dans cet article dans un temps raisonnable.

2. Opérations sur les graphes polarisés

Nous décrivons plus en détails les opérations mentionnées dans l’introduction. Bien que ces opérations puissent être définies au niveau des graphes polarisés abstraits, il est utile d’imaginer qu’elles opèrent sur un graphe plongé dans une surface. Pour chacune d’elles, nous mentionnons les conditions pour que l’opération maintienne la présence d’une marche à gauche complète, pour qu’elle préserve la cellularité du plongement et pour qu’elle conserve l’ordinarité du graphe. Nous évoquons aussi l’impact de l’opération sur la valence moyenne du graphe.

Contraction (Blow-down) : Si GG est un graphe et GGG^{\prime}\subset G un sous-graphe, cette opération consiste à contracter toutes arêtes de GG^{\prime} et à contracter les sommets de GG^{\prime} en un seul sommet.

Si GG est plongé dans une surface, et si GG^{\prime} est un arbre, la contraction de GG^{\prime} ne change pas la topologie de la surface. Sinon, dans le cas général, la contraction G/GG/G^{\prime} est un graphe sur une nouvelle surface singulière (à cusps) qui correspond exactement à la partie topologique du théorème de compacité de Gromov. Evidemment il suffit de répéter la contraction d’une seule arête, autant de fois qu’il le faut pour épuiser GG^{\prime}.

Si GG^{\prime} est un arbre, le nouveau graphe possède encore une marche à gauche complète et le caractère cellulaire du plongement est préservé. Si la valence moyenne de départ est supérieure à 22, alors la contraction de cet arbre augmente la valence moyenne. L’ordinarité du graphe n’est généralement pas préservée.

Eclatement (Blow-up) : Si vv est un sommet d’un graphe polarisé, et si KvK_{v} est une coupure dans l’ordre cyclique des arêtes incidentes à vv, l’éclatement de KvK_{v} introduit une arête eKve_{K_{v}} et un nouveau sommet vKvv_{K_{v}}. L’arête relie vv à vKvv_{K_{v}} et les arêtes incidentes à vv sont partitionnées entre vv et vKvv_{K_{v}} selon la coupure.

Cette opération préserve les marches (et en particulier les marches complètes) si dans la partition KvK_{v}, la première arête dans l’ordre cyclique est sortante et la dernière entrante. Cette opération doit respecter cette condition. Itérer cette opération en vv revient à partitionner les arêtes en plusieurs ensembles respectant l’ordre cyclique et la condition sortant-entrant.

En effectuant une suite d’éclatements en des sommets créés lors d’éclatements précédents, l’effet net est l’éclatement d’un sommet en un arbre dont toutes les nouvelles branches sont parcourues dans les deux sens par la marche complète. Nous parlerons donc d’éclatement élémentaire lorsqu’une seule arête est créée. Voir la fig. 2 pour une représentation graphique.

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Figure 2. Illustration de deux façons de faire l’éclatement

Chirurgie (Surgery) : Si e,fe,f sont deux arêtes incidentes à un sommet vv, de sorte qu’elles soient successives dans l’ordre cyclique, et que la marche entre par ee et ressorte à gauche par ff, la chirurgie consiste à unir les arêtes ee et ff, et donc à ne plus passer par vv. Voir la fig. 3(b) pour une représentation graphique.

Evidemment, cette opération n’a aucun sens si l’une ou les deux arêtes sont parcourues dans les deux sens. Dans de tels cas il faut alors dédoubler les arêtes parcourues dans les deux sens (opération décrite plus bas) avant de faire cette la chirurgie.

La préservation d’une marche à gauche complète est claire. Cette opération préserve l’ordinarité d’un graphe et décroît la valence moyenne (si la valence moyenne de départ est supérieure à 22). En général, la cellularité du graphe n’est pas préservée.

Subdivision : Pour une arête ee de GG, nous ajoutons un sommets vv^{\prime} au milieu de ee et produisons ainsi deux nouvelles arêtes incidentes à vv^{\prime}.

Cette opération préserve assurément la présence d’une marche à gauche, ainsi que la cellularité et l’ordinarité d’un graphe. Si la valence moyenne de départ est supérieure à 22, alors cette opération décroit la valence moyenne.

Arête parallèle (Parallel edge) : Soit GG un graphe polarisé, disons plongé dans une surface. Supposons que la marche à gauche complète suive une chaîne CC d’arêtes orientées distinctes e1,,ek1e_{1},\ldots,e_{k-1} qui relie les points p1p_{1} et pkp_{k} (possiblement égaux) et telle que toutes les arêtes e1¯,,ek1¯\overline{e_{1}},\ldots,\overline{e_{k-1}} soient aussi parcourues par la MC (pas forcément consécutivement). Nous pouvons alors introduire une nouvelle arête ee entre p1p_{1} et pkp_{k} tout juste à la gauche de CC.

Le graphe polarisé ainsi obtenu possède encore une marche complète, qui diffère de la MC originelle précisément du fait qu’elle suit l’arête orientée ee plutôt que la chaîne CC. Cette opération préserve le caractère cellulaire d’un plongement. Si aucune arête ne lie directement p1p_{1} et pkp_{k}, alors cette opération préserve l’ordinarité du graphe. La valence moyenne est aussi augmentée.

Un cas particulier de cette opération est le ”doubling trick” que voici:

Dédoublement (Doubling trick) : Si GG est un graphe généralisé polarisé, disons plongé dans une surface, et si une arête bb du graphe, reliant uu à vv, est parcourue deux fois dans la marche, donc dans les deux sens, le doubling trick consiste à introduire une nouvelle arête plongée bb^{\prime} C1C^{1}-près de bb. Voir la fig. 3(a) pour une représentation graphique.

Il s’agit d’un cas particulier de l’addition d’une arête parallèle, la chaîne CC étant ici prise égale à l’arête orientée b¯\bar{b}, qui se voit alors remplacée par une arête orientée bb^{\prime} légèrement déplacée vers la gauche de b¯\bar{b}. La marche à gauche visitera alors bb dans un sens, et bb^{\prime} dans l’autre sens. Cette opération préserve les marches, elle est nécessaire pour l’opération de chirurgie.

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(a) Le “doubling trick”
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(b) La chirurgie
Figure 3.

Somme connexe (Connected sum) : Soient Σ1\Sigma_{1} et Σ2\Sigma_{2} deux surfaces compactes orientées et GjΣjG_{j}\subset\Sigma_{j} (j=1,2j=1,2) des graphes plongés cellulairement avec MC. Soient FjΣjF_{j}\subset\Sigma_{j} la 22-cellule ouverte bordée par la MC de GjG_{j}. Effectuons la somme connexe F1#F2F_{1}\#F_{2} de façon à obtenir une surface compacte orientée Σ1#Σ2\Sigma_{1}\#\Sigma_{2}. Traçons ensuite une arête ee^{\prime} dans F1#F2F_{1}\#F_{2} qui relie v1G1v_{1}\in G_{1} à v2G2v_{2}\in G_{2} ; nous obtenons ainsi un graphe GΣ1#Σ2G^{\prime}\subset\Sigma_{1}\#\Sigma_{2}. Finalement, contractons ee^{\prime} pour obtenir le graphe G1#G2Σ1#Σ2G_{1}\#G_{2}\subset\Sigma_{1}\#\Sigma_{2}.

Puisque (F1#F2)e(F_{1}\#F_{2})\setminus e est un disque ouvert, les graphes GG^{\prime} et G1#G2G_{1}\#G_{2} sont cellulaires dans Σ1#Σ2\Sigma_{1}\#\Sigma_{2}. Les MNC de G1G_{1} et de G2G_{2} sont des MNC de GG^{\prime}. GG^{\prime} possède une MC qui consiste à parcourir entièrement la MC de G1G_{1} à partir de v1v_{1} (en empruntant d’abord l’arête de G1G_{1} qui suit l’arête ee dans l’ordre cyclique déterminée par la polarisation induite par l’orientation de Σ1#Σ2\Sigma_{1}\#\Sigma_{2}), puis à suivre ee vers v2v_{2}, à parcourir entièrement la MC de G2G_{2} à partir de v2v_{2} (en empruntant d’abord l’arête qui suit ee dans l’ordre cyclique déterminée par la polarisation), puis à revenir à v1v_{1} via ee. Il en résulte que G1#G2G_{1}\#G_{2} possède aussi une MC. Voir la fig. 4 pour une représentation graphique.

En tant que graphe abstrait, G1#G2G_{1}\#G_{2} est obtenu de l’union disjointe G1G2G_{1}\sqcup G_{2} en identifiant les sommets v1v_{1} et v2v_{2}. Soit v#G1#G2v_{\#}\in G_{1}\#G_{2} le sommet correspondant. Alors S(G1#G2)=S(G1)+S(G2)1S(G_{1}\#G_{2})=S(G_{1})+S(G_{2})-1, Vr(G1#G2)v#=Vr(G1)v1+Vr(G2)v2V_{r}(G_{1}\#G_{2})_{v_{\#}}=V_{r}(G_{1})_{v_{1}}+V_{r}(G_{2})_{v_{2}} et Vr(G1#G2)v=Vr(Gj)vV_{r}(G_{1}\#G_{2})_{v}=V_{r}(G_{j})_{v} pour tout vv#v\neq v_{\#} issu de GjG_{j} (les mêmes relations tiennent pour la valence totale). Il s’ensuit l’identité

Vr(G1#G2)\displaystyle V_{r}(G_{1}\#G_{2}) =Vr(G1)S(G1)S(G1)+S(G2)1+Vr(G2)S(G2)S(G1)+S(G2)1.\displaystyle=V_{r}(G_{1})\,\dfrac{S(G_{1})}{S(G_{1})+S(G_{2})-1}+V_{r}(G_{2})\,\dfrac{S(G_{2})}{S(G_{1})+S(G_{2})-1}\,.

Il est clair que G1#G2G_{1}\#G_{2} est ordinaire si G1G_{1} et G2G_{2} le sont.

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Figure 4. Somme connexe

3. Résultats sur les graphes homotopiques

Dans cette section, nous prouvons le 1.7 à travers les propositions 3.2 et 3.3 ci-dessous. Pour un graphe polarisé (G,P)(G,P), nous définissons ghom(G,P)g_{hom}(G,P) comme étant le minimum gg\in{\mathbb{N}} tel qu’il existe un plongement polarisé de (G,P)(G,P) dans Σg\Sigma_{g} une surface de genre gg de telle sorte que le graphe plongé soit homotopique. Pour i>0i\in{\mathbb{Z}}_{>0}, nous désignons par i:=i(G,P)\ell_{i}:=\ell_{i}(G,P) le nombre de marches à gauche dans (G,P)(G,P) de longueur ii.

Proposition 3.1.

Pour tout graphe polarisé (G,P)(G,P),

γ(G,P)+1+22\displaystyle\gamma(G,P)+\frac{\ell_{1}+\ell_{2}}{2} ghom(G,P).\displaystyle\leq g_{hom}(G,P).
Proof.

Soit ϕ:(G,P)Σg\phi:(G,P)\rightarrow\Sigma_{g} un plongement polarisé de (G,P)(G,P) dans une surface de genre g=ghom(G,P)g=g_{hom}(G,P) tel que ϕ(G)\phi(G) soit un graphe homotopique (par la suite, nous écrivons simplement GG pour désigner ϕ(G)\phi(G)). Soit WW une marche à gauche de longueur 11 ou 22 et soit NN un ϵ\epsilon-voisinage de WW dans Σg\Sigma_{g}. Pour ϵ>0\epsilon>0 suffisamment petit, la composante connexe de la frontière de NN qui se trouve à gauche de WW (par rapport à l’orientation donnée par la traversée des arêtes dans la direction décrite par WW) est l’image d’une courbe plongée α\alpha qui est homotope à WW. Notons que α\alpha n’est pas contractile, puisque GG est homotopique par hypothèse.

En coupant le long de α\alpha et en collant deux disques le long des deux composantes de bord, alors selon que αΣ\alpha\subset\Sigma soit non séparante ou séparante, nous obtenons soit une surface fermée Σ\Sigma^{\prime}, soit une union disjointe de deux surfaces fermées Σ\Sigma^{\prime} et Σ′′\Sigma^{\prime\prime} avec disons GΣG\subset\Sigma^{\prime}. Dans les deux cas de figure, la surface Σ\Sigma^{\prime} a genre g1g-1 ou moins : dans le premier cas, cela résulte du fait que Σ\Sigma s’obtient de Σ\Sigma^{\prime} par l’ajout d’une anse ; dans le second cas, c’est parce que Σ\Sigma est la somme connexe de Σ\Sigma^{\prime} et Σ′′\Sigma^{\prime\prime} et que Σ′′\Sigma^{\prime\prime} n’est pas une sphère puisque α\alpha n’est pas contractile.

Bref, nous obtenons un plongement de (G,P)(G,P) dans une surface fermée de genre au plus g1g-1 telle que WW et possiblement une seule autre marche WW^{\prime} de longueur 11 ou 22 soient contractiles dans Σ\Sigma^{\prime} (la marche WW^{\prime} serait homotope à la deuxième composante de bord de Σα\Sigma\setminus\alpha dans le cas où α\alpha est non séparante). Il est clair que nous pouvons répéter ce processus tant qu’il reste des marches de longueur 11 ou 22 qui ne sont pas contractiles, et ainsi le genre peut être réduit d’au moins 1+22\frac{\ell_{1}+\ell_{2}}{2}. Puisque γ(G,P)\gamma(G,P) est une borne inférieure pour le genre de toute surface dans laquelle (G,P)(G,P) se plonge, l’affirmation s’ensuit.   \square

Pour SS\in{\mathbb{N}}, posons π(S)=0\pi(S)=0 si SS est pair et posons π(S)=1\pi(S)=1 si SS est impair.

Proposition 3.2.

Soit GG un SS-graphe homotopique plongé dans une surface Σ\Sigma de genre gg. Si GG admet une marche à gauche complète, alors GG possède au plus 3g+3(S1)23g+\left\lfloor\dfrac{3(S-1)}{2}\right\rfloor arêtes, c’est-à-dire que

V(G)3+6g4+π(S)S.V(G)\leq 3+\dfrac{6g-4+\pi(S)}{S}\,.
Proof.

Puisque GG a un nombre entier d’arêtes, il suffit de montrer que ce nombre vaut tout au plus 3g+3(S1)/23g+3(S-1)/2. Supposons en vue d’une contradiction qu’il existe un SS-graphe polarisé (G,P)(G,P) avec au moins 3g+3(S1)/2+13g+3(S-1)/2+1 arêtes, qui admet une marche à gauche complète et tel qu’il existe un plongement polarisé ϕ:(G,P)Σg\phi:(G,P)\rightarrow\Sigma_{g} tel que ϕ(G)\phi(G) est homotopique. D’après la définition de γ=γ(G,P)\gamma=\gamma(G,P), nous avons 22γ=SA+F2-2\gamma=S-A+F et F1+1+2A1223F\leq 1+\ell_{1}+\ell_{2}-\frac{A-\ell_{1}-2\ell_{2}}{3}, puisque (G,P)(G,P) est un graphe admettant une marche à gauche complète, chaque marche non complète de longueur ii nécessite exactement ii arêtes et chaque arête appartient à au plus une marche non complète. Ceci implique

3g+3(S1)2+1\displaystyle 3g+\dfrac{3(S-1)}{2}+1\leq A3γ+3(S1)2+1+22,\displaystyle\,A\leq 3\gamma+\dfrac{3(S-1)}{2}+\ell_{1}+\frac{\ell_{2}}{2},

d’où 3(gγ)+11+223(g-\gamma)+1\leq\ell_{1}+\frac{\ell_{2}}{2}. D’après la définition de ghom=ghom(G,P)g_{hom}=g_{hom}(G,P), nous avons ghomgg_{hom}\leq g de sorte que 3(ghomγ)+11+223(g_{hom}-\gamma)+1\leq\ell_{1}+\frac{\ell_{2}}{2}. La 3.1 implique

31+22+1\displaystyle 3\frac{\ell_{1}+\ell_{2}}{2}+1 1+22\displaystyle\leq\ell_{1}+\frac{\ell_{2}}{2}
12+2\displaystyle\Leftrightarrow\;\;\frac{\ell_{1}}{2}+\ell_{2} 1,\displaystyle\leq-1,

ce qui est en contradiction évidente avec le fait que 1\ell_{1} et 2\ell_{2} sont des entiers naturels.   \square

Proposition 3.3.

Pour tout S,g1S,g\geq 1, il existe un SS-graphe homotopique plongé cellulairement dans Σg\Sigma_{g}, qui admet une marche à gauche complète et qui a

3g+3(S1)2 arêtes,3g+\left\lfloor\dfrac{3(S-1)}{2}\right\rfloor\;\mbox{ arêtes,}

de sorte que

V(G)=3+6g4+π(S)S.V(G)=3+\dfrac{6g-4+\pi(S)}{S}\,.
Proof.

Pour tout g1g\geq 1, nous commençons par construire la surface Σg\Sigma_{g} de genre gg comme surface de translation, c’est-à-dire au moyen d’un polygone P=P4gP=P_{4g} à 4g4g côtés cycliquement identifiés a1,b1,,ag,bg,a¯1,b¯1,,a¯g,b¯ga_{1},b_{1},\ldots,a_{g},b_{g},\bar{a}_{1},\bar{b}_{1},\ldots,\bar{a}_{g},\bar{b}_{g} et d’une application de quotient q:PΣgq:P\rightarrow\Sigma_{g} qui identifie aia_{i} et bib_{i} avec a¯i\bar{a}_{i} et b¯i\bar{b}_{i} respectivement via des homéomorphismes inversant l’orientation, pour i=1,,gi=1,\ldots,g. Il est utile de dénoter les sommets du polygone par p1,p2,,p4gp_{1},p_{2},\dots,p_{4g}, où a1=p1p2a_{1}=p_{1}p_{2}, b1=p2p3b_{1}=p_{2}p_{3}, etc. Bien sûr, tous ces pip_{i} sont identifiés par qq au même sommet vv. Observons que le monographe G0ΣgG_{0}\subset\Sigma_{g} résultant a 2g2g lacets qui appartiennent à des classes d’homotopie (et même d’homologie) distinctes et qu’il admet une seule marche à gauche (forcément complète).

Ensuite, soit SS^{\prime} le plus grand entier impair S\leq S. Nous subdivisons l’arête a1a_{1} en SS^{\prime} arêtes, introduisant de ce fait S1S^{\prime}-1 sommets p1,,pS1p^{\prime}_{1},\ldots,p^{\prime}_{S^{\prime}-1} entre p1p_{1} et p2p_{2}, dans cet ordre. Dans Σg\Sigma_{g}, tous ces points sont distincts. (Si S=1S=1, aucun sommet n’est alors ajouté.) Posons p0=p1p^{\prime}_{0}=p_{1}, pS=p2p^{\prime}_{S^{\prime}}=p_{2} et pS+1=p3p^{\prime}_{S^{\prime}+1}=p_{3}. Pour j=1,,(S+1)/2j=1,\ldots,(S^{\prime}+1)/2, considérons aussi les chaînes orientées Cj=p2j2p2j1p2jC_{j}=p^{\prime}_{2j-2}p^{\prime}_{2j-1}p^{\prime}_{2j} ; ce sont des segments de la marche complète sur G0G_{0} et nous pouvons donc ajouter une arête parallèle eje_{j} à chaque CjC_{j}. L’effet net est d’obtenir une arête eje_{j} liant les points p2j2p^{\prime}_{2j-2} et p2jp^{\prime}_{2j} pour tout j=1,,(S+1)/2j=1,\ldots,(S^{\prime}+1)/2. Similairement, pour chaque k=1,,g1k=1,\ldots,g-1, nous relions les sommets p2k+1p_{2k+1} et p2k+3p_{2k+3} par une arête dkd_{k} parallèle à la chaîne ak+1bk+1a_{k+1}b_{k+1}. (Voir la fig. 5(a) pour une représentation de cette construction).

Par projection par qq, nous obtenons ainsi un graphe plongé G1ΣgG_{1}\subset\Sigma_{g} avec SS^{\prime} sommets et 3g+3(S1)/23g+3(S^{\prime}-1)/2 arêtes et qui admet une marche complète. Nous affirmons que G1G_{1} est homotopique. D’une part, si S>1S^{\prime}>1, alors chaque arête q(ej)q(e_{j}) est l’unique arête dans G1G_{1} à relier ses extrémités, qui sont des sommets distincts. Si S=1S^{\prime}=1, alors la seule arête q(e1)q(e_{1}) relie les points q(p1)=q(p3)=vq(p_{1})=q(p_{3})=v et représente la classe d’homologie [q(a1)]+[q(b1)][q(a_{1})]+[q(b_{1})]. D’autre part, les arêtes q(fk)q(f_{k}) relient toutes le même sommet vv, mais elles représentent les classes d’homologie distinctes [q(ak+1)]+[q(bk+1)][q(a_{k+1})]+[q(b_{k+1})]. Dans tous les cas, les arêtes q(ej)q(e_{j}) et q(fk)q(f_{k}) ajoutées au graphe G0G_{0} pour obtenir G1G_{1} appartiennent à des classes d’homologie distinctes entre elles et distinctes des classes d’homologie des arêtes présentes dans G0G_{0}.

Si S=SS^{\prime}=S, alors G:=G1G:=G_{1} satisfait l’affirmation. Si S=S+1S=S^{\prime}+1, alors nous pouvons subdiviser n’importe quelle arête pour obtenir un graphe G:=G2G:=G_{2} ayant SS sommets et 3g+3(S1)/2+1=3g+3(S1)/23g+3(S^{\prime}-1)/2+1=3g+\left\lfloor 3(S-1)/2\right\rfloor arêtes. Il est clair que GG admet une marche à gauche complète, qu’il est homotopique et qu’il est plongé cellulairement.

\square

Refer to caption
(a) Cas g=2g=2, S=S=3S=S^{\prime}=3 de la construction dans la preuve de la 3.3
Refer to caption
(b) Un voisinage du sommet v=q(p1)v=q(p_{1}) dans G1G_{1} dans la preuve de la 3.3. Les flèches indiquent la direction de la marche complète vers la gauche.
Figure 5.

Le cas S=1S=1 nous sera particulièrement utile : la construction décrite ci-dessus fournit alors un monographe à 3g3g lacets, obtenu à partir du polygone de côtés a1,b1,,ag,bg,a¯1,b¯1,,a¯g,b¯ga_{1},b_{1},\ldots,a_{g},b_{g},\bar{a}_{1},\bar{b}_{1},\ldots,\bar{a}_{g},\bar{b}_{g} en tirant gg diagonales d1,,dgd_{1},\ldots,d_{g}djd_{j} relie le point source de aja_{j} au point cible de bjb_{j}. Nous appellerons ces monographes précis monographes optimaux standard.

4. Inégalités structurelles

4.1. Inégalités pour la valence totale

Soit un graphe généralisé polarisé (G,P)(G,P) ayant une marche à gauche complète et satisfaisant la condition suivante :

  • (C)

    Le graphe polarisé (G,P)(G,P) n’a pas de marche à gauche de longueur 1 ou 2.

Observons que les graphes ordinaires satisfont la condition (C). Afin d’alléger les notations, posons S=S(G)S=S(G), A=A(G)A=A(G) et V:=V(G)=(vGV(G)v)/SV:=V(G)=(\sum_{v\in G}V(G)_{v})/S (où VV dénote la valence totale).

Puisque le nombre de demi-arêtes dans GG est 2A2A et est aussi vGV(G)v\sum_{v\in G}V(G)_{v}, ceci implique

A=VS2.A=\dfrac{V\,S}{2}\,.

Chacune des 2A2A arêtes orientées de GG appartient à une unique orbite de la marche à gauche sur (G,P)(G,P). La MC a longueur au moins AA, de sorte que toutes les MNC couvrent ensemble au maximum AA arêtes. La condition (C) implique que chacune de ces MNC a longueur 33 ou plus. Tout ceci implique donc

F1+A3.F\leq 1+\dfrac{A}{3}\,.

Par définition du genre γ:=γ(G,P)\gamma:=\gamma(G,P), nous avons 22γ=SA+F2-2\gamma=S-A+F. Cette égalité, (\spadesuit) et (\heartsuit) donnent donc, après redistribution des termes et utilisation à nouveau de (\spadesuit) :

V3+6γ3S.V\leq 3+\dfrac{6\gamma-3}{S}\,.

Une inégalité un peu plus forte tient : par l’inégalité précédente et (\spadesuit), nous avons

V=2AS3+6γ3S=3(S1)+6γS 2A3(S1)+6γ.V=\dfrac{2A}{S}\leq 3+\dfrac{6\gamma-3}{S}=\dfrac{3(S-1)+6\gamma}{S}\;\Leftrightarrow\;2A\leq 3(S-1)+6\gamma.

Puisque cette dernière inégalité compare des entiers et que 2A2A est pair, nous pouvons renforcer cette inégalité comme suit, où π(n){0,1}\pi(n)\in\{0,1\} dénote la parité du nombre entier nn :

2A3(S1)+6γ1+π(S),2A\leq 3(S-1)+6\gamma-1+\pi(S)\,,

ce qui donne

V3+6γ4+π(S)S.V\leq 3+\dfrac{6\gamma-4+\pi(S)}{S}\,.

4.2. Inégalités pour la valence réduite

Observons que par définition de la valence réduite, nous avons Vr(G)vS(G)1V_{r}(G)_{v}\leq S(G)-1 pour tout sommet vGv\in G. Ainsi, nous avons

VrS1.V_{r}\leq S-1\,.

Similairement, puisque Vr(G)vV(G)vV_{r}(G)_{v}\leq V(G)_{v} pour tout vGv\in G, nous avons VrVV_{r}\leq V et donc (\diamondsuit) implique

Vr3+6γ4+π(S)S.V_{r}\leq 3+\dfrac{6\gamma-4+\pi(S)}{S}\,.

Finalement, nous avons

Ar=VrSr2.A_{r}=\dfrac{V_{r}\,S_{r}}{2}\,.

5. Résultats pour les graphes généralisés

5.1. Réduction aux graphes sans courte marche

Nous débutons d’abord par une procédure de réduction du graphe polarisé.

Lemme 5.1.

Soit (G,P)(G,P) un graphe généralisé polarisé ayant une marche complète et S3S\geq 3. Alors il existe un graphe généralisé polarisé (G,P)(G^{\prime},P^{\prime}) qui a une marche complète et qui satisfait la condition (C), qui ne diffère de GG que par le retrait de certaines arêtes, tel que γ(G,P)=γ(G,P)\gamma(G^{\prime},P^{\prime})=\gamma(G,P) et tel que Vr(G)v=Vr(G)vV_{r}(G^{\prime})_{v}=V_{r}(G)_{v} pour tout v𝒮(G)=𝒮(G)v\in\mathcal{S}(G)=\mathcal{S}(G^{\prime}).

Proof.

Plongeons (G,P)(G,P) cellulairement dans la surface Σ\Sigma de genre g=γ(G,P)g=\gamma(G,P).

Toute marche à gauche de longueur 11 de (G,P)(G,P) est un lacet basé en vGv\in G qui délimite un disque topologique dans Σ\Sigma : en contractant la lacet à travers le disque vers le sommet vv, nous obtenons un nouveau graphe G′′ΣG^{\prime\prime}\subset\Sigma qui a exactement les mêmes sommets que GG. Puisque le lacet contracté ne participait pas à la valence réduite Vr(G)vV_{r}(G)_{v}, nous avons Vr(G′′)p=Vr(G)pV_{r}(G^{\prime\prime})_{p}=V_{r}(G)_{p} pour tout p𝒮(G)=𝒮(G′′)p\in\mathcal{S}(G)=\mathcal{S}(G^{\prime\prime}). Les marches à gauche de la polarisation P′′P^{\prime\prime} induite par Σ\Sigma sur G′′G^{\prime\prime} sont les mêmes que celles de (G,P)(G,P), sauf (i) pour la marche de longueur 11 qui a été contractée et qui n’existe plus dans (G′′,P′′)(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime}) et (ii) pour la marche complète de (G,P)(G,P) qui se voit raccourcie d’une arête dans (G′′,P′′)(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime}) et qui est complète pour (G′′,P′′)(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime}). Il est clair que G′′G^{\prime\prime} est plongé cellulairement, donc γ(G′′,P′′)=g\gamma(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime})=g  ; alternativement, cela résulte des relations S(G′′)=S(G)S(G^{\prime\prime})=S(G), A(G′′)=A(G)1A(G^{\prime\prime})=A(G)-1 et F(G′′,P′′)=F(G,P)1F(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime})=F(G,P)-1. Par récurrence, nous nous réduisons à un graphe (G′′,P′′)(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime}) qui n’a pas de marche à gauche de longueur 11.

Toute marche à gauche de longueur 22 est une paire d’arêtes (e,f)(e,f) reliant des sommets v,wG′′v,w\in G^{\prime\prime} et qui délimitent un disque topologique DD (un bigone) dans Σ\Sigma. Afin d’être précis, supposons que le bord orienté de DD est D=f+e¯\partial D=f+\bar{e}. Nous effectuons alors l’opération inverse à l’opération de dédoublement : via une homotopie dans ce disque relative aux sommets vv et ww, nous « contractons » le disque et homotopons ainsi ff sur ee. Le résultat est un graphe GΣG^{\prime}\subset\Sigma qui ne diffère de G′′G^{\prime\prime} que par le retrait de ff. Compte tenu de ee, l’arête ff ne participait pas aux valences réduites Vr(G′′)vV_{r}(G^{\prime\prime})_{v} et Vr(G′′)wV_{r}(G^{\prime\prime})_{w}, donc nous avons Vr(G)p=Vr(G′′)pV_{r}(G^{\prime})_{p}=V_{r}(G^{\prime\prime})_{p} pour tout p𝒮(G)=𝒮(G)p\in\mathcal{S}(G)=\mathcal{S}(G^{\prime}). Les marches à gauche de la polarisation P′′P^{\prime\prime} induite par Σ\Sigma sur G′′G^{\prime\prime} sont les mêmes que celles de (G′′,P′′)(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime}), sauf (i) pour la marche [f,e¯][f,\bar{e}] qui a été contractée et qui n’existe plus dans (G,P)(G^{\prime},P^{\prime}) et (ii) pour la marche complète de (G′′,P′′)(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime}) qui, au lieu de passer par ff, passe par ee dans (G,P)(G^{\prime},P^{\prime}) et est donc encore complète. Il est clair que GG^{\prime} est plongé cellulairement, donc γ(G,P)=g\gamma(G^{\prime},P^{\prime})=g  ; alternativement, cela résulte des relations S(G)=S(G′′)S(G^{\prime})=S(G^{\prime\prime}), A(G)=A(G′′)1A(G^{\prime})=A(G^{\prime\prime})-1 et F(G,P)=F(G′′,P′′)1F(G^{\prime},P^{\prime})=F(G^{\prime\prime},P^{\prime\prime})-1. Par récurrence, nous nous réduisons à un graphe (G,P)(G^{\prime},P^{\prime}) qui n’a pas de marche à gauche de longueur 11 ou 22, bref qui satisfait la condition (C).   \square

Ainsi, il nous suffit de démontrer le 1.10 sous l’hypothèse additionnelle que GG satisfait la condition (C), ce qui nous permet d’avoir recours aux inégalités structurelles de la section 4.


5.2. 1.10

La démonstration est scindée en plusieurs propositions.

Proposition 5.2.

Vc(0)=3V_{c}(0)=3 et ce supremum n’est réalisé par aucun graphe.

Proof.

D’abord, (\diamondsuit) implique VrV<3V_{r}\leq V<3 pour tout graphe plongé cellulairement dans la sphère et qui a une MC, de sorte que Vc(0)3V_{c}(0)\leq 3 et V(G)<3V(G)<3 pour tout graphe GG plongé cellulairement dans la sphère. Ensuite, pour tout n>0n\in\mathbb{Z}_{>0}, considérons d’abord le monographe à nn lacets, puis subdivisons chaque lacet en trois arêtes afin d’obtenir un graphe ordinaire GnG_{n}. Il est clair que GnG_{n} se plonge dans la sphère et qu’il possède une MC. Puisque GnG_{n} a un sommet de valence 2n2n et 2n2n sommets de valence 22, nous calculons V(Gn)=6n/(1+2n)V(G_{n})=6n/(1+2n). En prenant la limite quand n+n\to+\infty, nous déduisons que Vc(0)3V_{c}(0)\geq 3. Bref, Vc(0)=3V_{c}(0)=3 et ce supremum n’est pas réalisé.   \square

Proposition 5.3.

Pour tout g1g\geq 1, il existe un graphe ordinaire GG plongé cellulairement dans Σg\Sigma_{g}, qui possède une MC et qui a V(G)=4(1+13g)1V(G)=4\,\left(1+\dfrac{1}{3g}\right)^{-1}.

Proof.

Considérons le monographe GG^{\prime} à 3g3g lacets construit lors de la 3.3 et décrit explicitement suite à celle-ci. Dans le polygone PP, nous avons ainsi gg triangles T1,,TgT_{1},\ldots,T_{g}, chacun délimité par les côtés aj,bja_{j},b_{j} et djd_{j}. Plongeons dans l’intérieur de chaque TjT_{j} une copie TjT^{\prime}_{j} du triangle TjT_{j}, obtenant ainsi trois arêtes aj,bja^{\prime}_{j},b^{\prime}_{j} et djd^{\prime}_{j}, puis relions par une arête chacun des trois sommets de TjT^{\prime}_{j} au sommet le plus proche de TjT_{j}. Nous définissons le graphe GG comme étant l’image par qq de l’union de tous les TjT^{\prime}_{j} et de toutes les arêtes reliant les TjT^{\prime}_{j} aux TjT_{j}. (Voir la fig. 6).

Le graphe GG ainsi obtenu est pour ainsi dire une perturbation de GG^{\prime} et correspond à l’éclatement du sommet de GG^{\prime} en une étoile à 3g3g pointes. Les pointes de cette étoile relient le sommet « central » à chacun des 3g3g autres sommets de GG que sont les images par qq des coins des TjT^{\prime}_{j}. GG est donc clairement ordinaire, et il est cellulaire et il a une MC puisqu’il est un éclatement du sommet de GG^{\prime}. Puisque GG a un sommet de valence 3g3g et 3g3g sommets de valence 33, nous calculons V(G)=4(1+13g)1V(G)=4\,\left(1+\dfrac{1}{3g}\right)^{-1}.   \square

Refer to caption
Figure 6. Une illustration de la construction de GG dans la preuve de 5.3 dans le cas où g=2g=2, j=2j=2

Ainsi, pour g2g\geq 2, nous connaissons un graphe ordinaire plongé cellulairement dans Σg\Sigma_{g} avec une MC tel que V(G)>3V(G)>3. La fig. 7 plus loin montre qu’il existe aussi un tel graphe pour g=1g=1.

Rappelons que nous définissons la fonction

b(g)\displaystyle b(g) :=1+1+6g\displaystyle:=1+\sqrt{1+6g}
Proposition 5.4.

Pour tout g1g\geq 1, Vc(g)b(g)V_{c}(g)\leq b(g).

Proof.

Soit GG un graphe généralisé plongé cellulairement dans Σg\Sigma_{g} et qui possède une MC ; il suffit de montrer que V:=V(G)b(g)V:=V(G)\leq b(g). Compte tenu du commentaire précédant l’actuelle Proposition, nous pouvons supposer Vr>3V_{r}>3. Ainsi, du fait que Vr3>0V_{r}-3>0, (r\diamondsuit_{r}) et (r\clubsuit_{r}) impliquent

6γ3(Vr+1)(Vr3) 0Vr22Vr6γ.6\gamma-3\geq\left(V_{r}+1\right)\left(V_{r}-3\right)\;\Leftrightarrow\;0\geq V_{r}^{2}-2V_{r}-6\gamma\,.

Puisque b(γ)b(\gamma) est la plus grande racine de ce dernier polynome quadratique, nous obtenons Vrb(γ)V_{r}\leq b(\gamma). Puisque GG est plongé cellulairement, γ=g\gamma=g.   \square

Proposition 5.5.

Pour tout g1g\geq 1, le supremum Vc(g)V_{c}(g) est réalisé.

Proof.

Soit 3<V<Vc(g)3<V_{*}<V_{c}(g) et considérons l’ensemble XX des graphes (généralisés, cellulaires, avec MC) GG qui satisfont Vr(G)VV_{r}(G)\geq V_{*}. Il résulte alors de (r\diamondsuit_{r}) que S(G)S:=(6g3)/(V3)S(G)\leq S_{*}:=(6g-3)/(V_{*}-3). Par cette inégalité, la 5.4 et (r\spadesuit_{r}), il résulte que Ar(G)A:=Sb(g)/2A_{r}(G)\leq A_{*}:=S_{*}b(g)/2. Ainsi, l’image de l’application X×:G(S(G),Ar(G))X\to\mathbb{N}\times\mathbb{N}:G\mapsto(S(G),A_{r}(G)) a cardinalité finie, et donc aussi l’image de l’application X:GVr(G)X\to\mathbb{Q}:G\mapsto V_{r}(G). Ainsi, Vc(g)V_{c}(g) est réalisé parmi les éléments de XX.   \square

Pour le prochain résultat, rappelons que x0\lceil x\rceil_{0} et x1\lceil x\rceil_{1} désignent respectivement les plus petits entiers pair et impair plus grands ou égaux à xx et que x0\lfloor x\rfloor_{0} et x1\lfloor x\rfloor_{1} désignent respectivement les plus petits entiers pair et impair plus petits ou égaux à xx. Rappelons que nous définissons

br(g)\displaystyle b_{r}(g) :=max{S0(g)01,S1(g)11, 3+6g4S0(g)0, 3+6g3S1(g)1},\displaystyle:=\mathrm{max}\,\left\{\,\lfloor{S_{0}(g)}\rfloor_{0}-1\,,\,\lfloor{S_{1}(g)}\rfloor_{1}-1\,,\,3+\dfrac{6g-4}{\lceil S_{0}(g)\rceil_{0}}\,,\,3+\dfrac{6g-3}{\lceil S_{1}(g)\rceil_{1}}\right\},

Sj(g):=2+6g+jS_{j}(g):=2+\sqrt{6g+j} pour j=0, 1j=0,\,1.

Proposition 5.6.

Pour tout g1g\geq 1, Vc(g)br(g)b(g)V_{c}(g)\leq b_{r}(g)\leq b(g)

Proof.

Il suffit de considérer les graphes dans l’ensemble XX des graphes généralisés, cellulaires dans Σg\Sigma_{g}, avec MC et satisfaisant Vr(G)>3V_{r}(G)>3. Posons N(S):=6g4+π(S)N(S):=6g-4+\pi(S) et N(G)=N(S(G))N(G)=N(S(G)). Les inégalités (r\clubsuit_{r}) et (r\diamondsuit_{r}) impliquent Vr(G)min{S(G)1, 3+N(G)/S(G)}V_{r}(G)\leq\mathrm{min}\,\{S(G)-1\,,\,3+N(G)/S(G)\}. Cette inégalité et la 5.5 nous permettent de déduire que

Vc(g)\displaystyle V_{c}(g) =maxGXVr(G)\displaystyle=\mathrm{max}_{G\in X}\,V_{r}(G)
maxGXmin{S(G)1, 3+N(G)/S(G)}\displaystyle\leq\mathrm{max}_{G\in X}\,\mathrm{min}\,\{S(G)-1\,,\,3+N(G)/S(G)\}
=maxSmin{S1, 3+N(S)/S}.\displaystyle=\mathrm{max}_{S}\,\mathrm{min}\,\{S-1\,,\,3+N(S)/S\}\,.

Pour j=0,1j=0,1, posons Nj:=6g4+jN_{j}:=6g-4+j. Observons que sur l’ensemble des SS satisfaisant π(S)=j\pi(S)=j, les fonctions S1S-1 et 3+Nj/S3+N_{j}/S sont respectivement croissante et décroissante et coïncident pour Sj:=2+Nj+4=2+6g+jS_{j}:=2+\sqrt{N_{j}+4}=2+\sqrt{6g+j}. Ainsi,

min{S1, 3+N(S)S}={S1 si S satisfait π(S)=j et SSjj,3+N(S)S si S satisfait π(S)=j et SSjj .\mathrm{min}\,\left\{S-1\,,\,3+\dfrac{N(S)}{S}\right\}=\begin{cases}S-1&\mbox{ si $S$ satisfait $\pi(S)=j$ et $S\leq\lfloor S_{j}\rfloor_{j}$},\\ 3+\dfrac{N(S)}{S}&\mbox{ si $S$ satisfait $\pi(S)=j$ et $S\geq\lceil S_{j}\rceil_{j}$ \, .}\end{cases}

En maximisant cette quantité sur les SS, nous obtenons br(g)b_{r}(g). Il découle de l’argumentaire que br(g)S1(g)1=b(g)b_{r}(g)\leq S_{1}(g)-1=b(g).   \square

5.3. 1.11

Nous divisons la démonstration en plusieurs propositions, une pour chaque genre 1g51\leq g\leq 5. Nous exhiberons un graphe optimal pour chacun de ces gg, mais différentes représentations de ces graphes seront employées.

Proposition 5.7.

Soit GG un graphe qui est plongé dans une surface de genre 11 et qui admet une marche à gauche complète. Alors V(G)337V(G)\leq 3\frac{3}{7}. De plus, il existe un graphe qui réalise l’égalité.

Proof.

Puisque V(1)=max{Vc(0),Vc(1)}V(1)=\mathrm{max}\{V_{c}(0),V_{c}(1)\} et Vc(0)=3V_{c}(0)=3, il suffit d’établir Vc(1)=337V_{c}(1)=3\frac{3}{7}. Nous savons que Vc(1)br(1)=max{2, 3, 313, 335}=335V_{c}(1)\leq b_{r}(1)=\mathrm{max}\,\left\{2\,,\,3\,,\,3\frac{1}{3}\,,\,3\frac{3}{5}\right\}=3\frac{3}{5}. Nous affirmons que Vc(1)<br(1)V_{c}(1)<b_{r}(1), ce qui exige que nous investiguions davantage la structure de graphes maximaux hypothétiques.

Soit GG satisfaisant Vr(G)337V_{r}(G)\geq 3\frac{3}{7}. En combinant cet ansatz à (r\clubsuit_{r}) et à (r\diamondsuit_{r}) et du fait que SS est entier, nous obtenons 5S(G)75\leq S(G)\leq 7. La possibilité S=6S=6 est exclue, puisque l’inégalité (r\diamondsuit_{r}) impliquerait Vr(G)313V_{r}(G)\leq 3\frac{1}{3}, à l’encontre de l’ansatz.

Montrons qu’aucun graphe avec S(G)=5S(G)=5 ne respecte l’ansatz. Supposons au contraire qu’un tel graphe GG existe. L’inégalité (\diamondsuit), qui porte sur la valence totale, donne V(G)335V(G)\leq 3\frac{3}{5}. Ceci et l’ansatz impliquent donc, via (\spadesuit), qu’un graphe GG avec S=5S=5 sommets a précisément A=9A=9 arêtes. Donc V(G)=335V(G)=3\frac{3}{5} et l’inégalité (\diamondsuit) est saturée. Par la formule d’Euler, nous voyons que GG a trois MNC de longueur 33 et une MC qui a longueur 99 et qui est donc un cycle eulérien. Ainsi GG est construit à partir de 33 triangles disjoints T1T_{1}, T2T_{2} et T3T_{3} via certains recollements de leurs sommets. Puisque les 33 triangles ont 99 coins et S(G)=5S(G)=5, le recollement n’est pas trivial : nous pouvons supposer que T1T_{1} et T2T_{2} ont des coins identifiés. Si deux points de T1T_{1} sont identifiés entre eux ou s’il y a deux paires de coins identifiés (p,q),(p,q)T1×T2(p,q),(p^{\prime},q^{\prime})\in T_{1}\times T_{2}, alors GG n’est pas un graphe ordinaire (il possède au moins une boucle ou une arête multiple) ; nous avons alors forcément Ar(G)8A_{r}(G)\leq 8 et donc Vr(G)315V_{r}(G)\leq 3\frac{1}{5}, ce qui va à l’encontre de l’ansatz. Donc, après recollement, les triangles T1T_{1} et T2T_{2} ne partagent qu’un coin en commun et contribuent donc précisément 55 sommets à GG, c’est-à-dire tous les sommets de GG. Les trois sommets de T3T_{3} sont donc forcément identifiés à des sommets de T1T_{1} ou de T2T_{2} ; encore une fois, ceci implique que GG n’est pas ordinaire et donc Vr(G)315V_{r}(G)\leq 3\frac{1}{5}, à l’encontre de l’ansatz.

Ainsi, l’ansatz ne peut être respecté que par un graphe à S=7S=7 sommets. Un raisonnement analogue à celui ci-dessus établit alors que V(G)=337V(G)=3\frac{3}{7}, que (\diamondsuit) est saturée et donc que GG est un quotient de 44 triangles disjoints. La fig. 7 exhibe un tel graphe ordinaire GG. La fig. 8 illustre une série d’opérations qui permettent d’obtenir ce graphe à partir du monographe homotopique optimal standard dans le tore : trois éclatements élémentaires, dédoublement de ces trois arêtes, puis subdivision d’une arête dans chaque paire obtenue.   \square

Refer to caption
Figure 7. Graphe dans le tore réalisant V(G)=337V(G)=3\frac{3}{7}.
Refer to caption
Figure 8. Suite d’opérations locales produisant le graphe précédent à partir du monographe optimal standard dans le tore.
Proposition 5.8.

Soit GG un graphe qui est plongé dans une surface de genre 22 et qui admet une marche à gauche complète. Alors V(G)br(2)=413V(G)\leq b_{r}(2)=4\frac{1}{3} et l’égalité est possible.

Proof.

Nous avons déjà établi Vc(0),Vc(1)413V_{c}(0),V_{c}(1)\leq 4\frac{1}{3}, tandis que Vc(2)br(2)=max{2, 4, 413, 427}=413V_{c}(2)\leq b_{r}(2)=\mathrm{max}\,\left\{2\,,\,4\,,\,4\frac{1}{3}\,,\,4\frac{2}{7}\right\}=4\frac{1}{3}. Ainsi, V(2)=max0g2Vc(g)413V(2)=\mathrm{max}_{0\leq g\leq 2}\,V_{c}(g)\leq 4\frac{1}{3}.

Voici une démonstration directe de l’inégalité V(2)413V(2)\leq 4\frac{1}{3}, qui est intéressante du fait qu’elle apporte un certain éclairage sur l’idée générale derrière la 5.6. Soit GG un graphe ordinaire plongé dans Σ2\Sigma_{2} et qui admet une MC. Supposons, par contradiction, que Vr:=Vr(G)>413V_{r}:=V_{r}(G)>4\frac{1}{3}. Puisque VVr>3V\geq V_{r}>3 par hypothèse, les inégalités (\diamondsuit) et (\clubsuit) donnent

S\displaystyle S 6γ3V3.\displaystyle\leq\frac{6\gamma-3}{V-3}.

En utilisant le fait que γg\gamma\leq g lorsque (G,P)(G,P) se plonge dans Σg\Sigma_{g}, nous obtenons ici

(\ast) S\displaystyle S 9V3.\displaystyle\leq\frac{9}{V-3}.

Il résulte des inégalités précédentes que

513<\displaystyle 5\frac{1}{3}<\, S<634,\displaystyle S<6\frac{3}{4},

ce qui implique S=6S=6, puisque SS\in{\mathbb{N}}. L’inégalité (\ast5.3) avec S=6S=6 se réarrange alors pour donner

V\displaystyle V 276,\displaystyle\leq\frac{27}{6},

de sorte que 266<V276\frac{26}{6}<V\leq\frac{27}{6}. Puisque V(G)=1SpGV(p)V(G)=\frac{1}{S}\sum_{p\in G}V(p), et pGV(p)\sum_{p\in G}V(p)\in{\mathbb{N}}, cela implique que pGV(p)=27\sum_{p\in G}V(p)=27, mais pGV(p)=2A\sum_{p\in G}V(p)=2A doit être pair, d’où la contradiction recherchée.

Afin d’exhiber un exemple de graphe ordinaire plongé dans une surface de genre 22 qui sature l’inégalité, nous suivons une stratégie similaire à celle employée dans le cas du genre 11 : nous considérons d’abord le monographe homotopique optimal standard G0G_{0} pour g=2g=2 (fig. 9(a)) et nous explicitons la structure d’incidence de ses arêtes à son sommet (fig. 9(b)).

Refer to caption
(a) La construction du monographe G0G_{0}
Refer to caption
(b) Une image locale d’un voisinage du sommet dans Σ2\Sigma_{2}
Figure 9.

Le graphe ordinaire optimal GG est produit en remplaçant G0G_{0} dans ce voisinage local par le plongement représenté dans la fig. 10. Encore une fois, cet éclatement du sommet du monographe s’obtient d’une suite d’éclatements élémentaires (afin de produire les cinq arêtes radiales), puis de l’ajout de deux arêtes parallèles (afin de produire les deux triangles centraux).

Refer to caption
Figure 10. L’éclatement du sommet de GG. La marche à gauche complète sur GG^{\prime} suit les directions indiquées.

\square

Proposition 5.9.

Soit GG un graphe qui est plongé dans une surface de genre 33 et qui admet une marche à gauche complète. Alors V(G)br(3)=517V(G)\leq b_{r}(3)=5\frac{1}{7} et l’égalité est possible.

Proof.

Nous avons déjà établi que Vc(0),Vc(1),Vc(2)517V_{c}(0),V_{c}(1),V_{c}(2)\leq 5\frac{1}{7}, tandis que Vc(3)br(3)=max{5, 4, 434, 517}=517V_{c}(3)\leq b_{r}(3)=\mathrm{max}\,\left\{5\,,\,4\,,\,4\frac{3}{4}\,,\,5\frac{1}{7}\right\}=5\frac{1}{7}. Ainsi, V(3)=max0g3Vc(g)517V(3)=\mathrm{max}_{0\leq g\leq 3}\,V_{c}(g)\leq 5\frac{1}{7}.

La fig. 11 exhibe un graphe qui sature cette borne. La surface Σ3\Sigma_{3} y est présentée comme quotient d’un polygone à 2424 côtés, à savoir les segments a1,,a¯12a_{1},\ldots,\bar{a}_{12}. (À vrai dire, à des fins de lisibilité, la figure présente un rectangle plutôt qu’un polygone à 2424 côtés, mais les côtés verticaux du rectangle sont des signes d’égalité entre les sommets correspondants ; ces côtés ne font pas partie des 2424 côtés du polygone.) Après identifications de ces 2424 côtés entre eux, nous obtenons une surface orientée de genre 33 dont la décomposition en CW-complexe comprend sept 0-cellules, les douze 11-cellules déterminées par les segments ak=a¯ka_{k}=\bar{a}_{k} et une 22-cellule (donnée par l’intérieur du « rectangle »). Par la formule d’Euler, la surface est donc bien de genre 33. Un graphe G0Σ3G_{0}\subset\Sigma_{3} à 77 sommets et 1212 arêtes (les a1,,a12a_{1},\ldots,a_{1}2) est ainsi obtenu comme 11-squelette du CW-complexe.

Le graphe GG est obtenu en ajoutant les six diagonales d1,,d6d_{1},\ldots,d_{6} à G0G_{0}. Il est clair que GG est plongé cellulairement, qu’il possède six MNC de longueur 33 (délimitées par les 22-cellules en demi-lune) et qu’il possède une MC (délimitée par la 22-cellule du haut complémentaire aux six demi-lunes) qui est un cycle eulérien. GG est ordinaire : par inspection, aucune arête de GG ne lie un sommet à lui-même et aucune paire de sommets n’est liée par deux arêtes distinctes ou plus. Finalement, V(G)=2A/S=36/7V(G)=2A/S=36/7, tel qu’annoncé.

Refer to caption
Figure 11. Graphe optimal pour g=3g=3. Les deux sommets de gauche sont identifiés ensemble, tout comme le sont les deux sommets de droite, d’où les signes d’égalité verticaux.

\square

Proposition 5.10.

Soit GG un graphe qui est plongé dans une surface de genre 44 et qui admet une marche à gauche complète. Alors V(G)b(4)=6V(G)\leq b(4)=6 et l’égalité est possible.

Proof.

Nous avons déjà établi que Vc(0),Vc(1),Vc(2),Vc(3)6V_{c}(0),V_{c}(1),V_{c}(2),V_{c}(3)\leq 6, tandis que Vc(4)br(4)=max{5, 6, 512, 6}=6V_{c}(4)\leq b_{r}(4)=\mathrm{max}\,\left\{5\,,\,6\,,\,5\frac{1}{2}\,,\,6\right\}=6. Ainsi, V(4)=max0g4Vc(g)6V(4)=\mathrm{max}_{0\leq g\leq 4}\,V_{c}(g)\leq 6. Observons aussi que b(4)=6b(4)=6.

La fig. 12 exhibe un graphe qui sature cette borne. De nouveau, la surface Σ4\Sigma_{4} est présentée comme quotient d’un polygone à 2828 côtés. (Encore une fois, les côtés gauche et droite du rectangle sont des signes d’égalité entre les sommets correspondants et ne font pas partie des 2828 côtés.) Après identifications, ces 2828 côtés déterminent bien une surface orientée de genre 44, dont la décomposition en CW-complexe comprend sept 0-cellules, les quatorze 11-cellules déterminées par les segments ak=a¯ka_{k}=\bar{a}_{k} et une 22-cellule (donnée par l’intérieur du « rectangle »).

Le graphe GG est obtenu en ajoutant les sept diagonales d1,,d7d_{1},\ldots,d_{7} aux quatorze arêtes aka_{k} formant le 11-squelette du CW-complexe. Il est clair que GG est plongé cellulairement, qu’il possède sept MNC de longueur 33 (délimitées par les 22-cellules en demi-lune) et qu’il possède une MC (délimitée par la 22-cellule du haut complémentaire aux sept demi-lunes) qui est un cycle eulérien. Encore une fois, nous voyons par inspection que GG est ordinaire. Finalement, V(G)=2A/S=6V(G)=2A/S=6.

Refer to caption
Figure 12. Graphe optimal pour g=4g=4.

\square

Proposition 5.11.

Soit GG un graphe qui est plongé dans une surface de genre 55 et qui admet une marche à gauche complète. Alors V(G)br(4)=614V(G)\leq b_{r}(4)=6\frac{1}{4} et l’égalité est possible.

Proof.

Nous avons déjà établi que Vc(0),,Vc(4)614V_{c}(0),\ldots,V_{c}(4)\leq 6\frac{1}{4}, tandis que Vc(5)br(5)=max{5, 6, 614, 6}=6V_{c}(5)\leq b_{r}(5)=\mathrm{max}\,\left\{5\,,\,6\,,\,6\frac{1}{4}\,,\,6\right\}=6. Ainsi, V(5)=max0g5Vc(g)614V(5)=\mathrm{max}_{0\leq g\leq 5}\,V_{c}(g)\leq 6\frac{1}{4}.

Un graphe ordinaire GG qui sature cette borne est présenté dans la fig. 13. Les sommets de GG sont numérotés de 11 à 88 et l’ensemble des arêtes incidentes à chaque sommet est dessiné. La polarisation est donnée par les ordres cycliques prescrits par la Figure.

Il est clair que GG est ordinaire et il est facile de constater qu’il est connexe. Les sommets 11 et 22 ont valence 77 et les autres sommets ont valence 66, d’où une valence moyenne V(G)=50/8V(G)=50/8. Le graphe a donc 2525 arêtes.

La MC, de longueur 2626, est donnée par la suite de sommets suivante :

1,2,3,7,8,5,6,3,8,2,1,5,4,6,2,7,1,3,4,8,1,4,2,5,7,6,1.1,2,3,7,8,5,6,3,8,2,1,5,4,6,2,7,1,3,4,8,1,4,2,5,7,6,1.

Les huit MNC ont toutes longueur 33 et sont :

(i) 3,2,4,3.\displaystyle(i)\,3,2,4,3.\; (ii) 7,3,6,7.\displaystyle(ii)\,7,3,6,7.\; (iii) 8,7,2,8.\displaystyle(iii)\,8,7,2,8.\; (iv) 5,8,4,5.\displaystyle(iv)\,5,8,4,5.
(v) 6,5,2,6.\displaystyle(v)\,6,5,2,6.\; (vi) 8,3,1,8.\displaystyle(vi)\,8,3,1,8.\; (vii) 5,1,7,5.\displaystyle(vii)\,5,1,7,5.\; (viii) 6,4,1,6.\displaystyle(viii)\,6,4,1,6.

Pour se convaincre que nous avons trouvé toutes les marches à gauche et que la MC est bien complète, il suffit de remarquer que les neuf marches identifiées sont distinctes et parcourent 5050 arêtes orientées (forcément distinctes), et donc qu’elles parcourent toutes les arêtes orientées de GG. Finalement, le genre du graphe polarisé est bien γ=5\gamma=5.

Refer to caption
Figure 13. Graphe optimal pour g=5g=5.

\square

Refer to caption
Figure 14. Représentation « cubiste » dans le plan du graphe optimal pour g=5g=5. Les huit triangles délimités par les MNC sont hachurés : trois sont représentés connexes, les cinq autres sont représentés disconnexes.

6. 1.12

La démonstration du 1.12 repose sur une compréhension plus précise des structures des graphes GG (généralisés, plongés cellulairement dans Σg\Sigma_{g} et avec MC) qui satisfont Vr(G)=br(g)V_{r}(G)=b_{r}(g), pour les gg appropriés. Les parties (a) et (b) sont mutuellement indépendantes, mais elles reposent implicitement toutes deux sur le fait que br(g)b_{r}(g) est alors égal à deux des quatre termes dont br(g)b_{r}(g) est le maximum.

6.1. Démonstration de la partie (a)

Pour g=6k2g=6k^{2}, observons que S0(g):=2+6g=2+6kS_{0}(g):=2+\sqrt{6g}=2+6k est un entier pair, donc S0(g)=S0(g)0=S0(g)0S_{0}(g)=\lfloor S_{0}(g)\rfloor_{0}=\lceil S_{0}(g)\rceil_{0}. Par ailleurs, quel que soit g1g\geq 1, nous avons S0(g)<S1(g)<S0(g)+1S_{0}(g)<S_{1}(g)<S_{0}(g)+1 ; ainsi, pour g=6k2g=6k^{2}, nous avons S1(g)1=S0(g)1\lfloor S_{1}(g)\rfloor_{1}=S_{0}(g)-1 et S1(g)1=S0(g)+1\lceil S_{1}(g)\rceil_{1}=S_{0}(g)+1. Puisque 6g4=S0(g)(S0(g)4)>S0(g)6g-4=S_{0}(g)(S_{0}(g)-4)>S_{0}(g), des calculs simples établissent que

S0(g)01=3+6g4S0(g)0>max{S1(g)11, 3+6g3S1(g)1}.\lfloor S_{0}(g)\rfloor_{0}-1=3+\dfrac{6g-4}{\lceil S_{0}(g)\rceil_{0}}>\mathrm{max}\left\{\lfloor S_{1}(g)\rfloor_{1}-1\,,\,3+\dfrac{6g-3}{\lceil S_{1}(g)\rceil_{1}}\right\}\,.

Bref, nous avons

br(g)=S0(g)01=3+6g4S0(g)0.b_{r}(g)=\lfloor S_{0}(g)\rfloor_{0}-1=3+\dfrac{6g-4}{\lceil S_{0}(g)\rceil_{0}}\,.

De manière absurde, soit GG un graphe généralisé, plongé cellulairement dans Σg\Sigma_{g} et avec MC qui satisfait Vr(G)=br(g)V_{r}(G)=b_{r}(g). Par le 5.1, nous pouvons supposer que GG satisfait la condition (C). Posons S=S(G)S=S(G). Par l’inégalité (r\clubsuit_{r}), nous avons

S0(g)1=br(g)=Vr(G)S1,S_{0}(g)-1=b_{r}(g)=V_{r}(G)\leq S-1\,,

tandis que par (\diamondsuit) et (6.1),

3+6g3S0(g)+1<3+6g4S0(g)=br(g)=Vr(G)V(G)3+6g3S.3+\dfrac{6g-3}{S_{0}(g)+1}<3+\dfrac{6g-4}{S_{0}(g)}=b_{r}(g)=V_{r}(G)\leq V(G)\leq 3+\dfrac{6g-3}{S}\,.

Il en résulte que S=S0(g)S=S_{0}(g) et que Vr(G)=V(G)=3+(6g4)/SV_{r}(G)=V(G)=3+(6g-4)/S. En particulier, GG est ordinaire et nous pouvons travailler avec la valence totale.

Puisque V(G)vS1V(G)_{v}\leq S-1 pour un graphe ordinaire et du fait que V(G)=S1V(G)=S-1, nous déduisons que GG est un graphe complet sur SS sommets et que tous les sommets de GG sont de valence impaire.

De V(G)=3+(6g4)/SV(G)=3+(6g-4)/S et de (\spadesuit), nous déduisons A=3S/2+3g2A=3S/2+3g-2. Du fait que GG soit cellulaire dans Σg\Sigma_{g}, la formule d’Euler implique que GG possède f:=F1=S/2+g1=(A1)/3f:=F-1=S/2+g-1=(A-1)/3 MNC. Par la condition (C) et la définition d’une MC, ces ff MNC parcourent (dans une seule direction) entre A1A-1 et AA arêtes non orientées distinctes de GG (puisque chaque arête non orientée apparaît au plus une fois dans tous les MNC étant donné l’existence d’un MC). Il y a donc au moins f1f-1 MNC de longueur 33 et la MNC restante a longueur 33 ou 44 ; nous considérons ces deux possibilités séparément.

Si la MNC restant a longueur 44, alors la MC a longueur AA et il s’agit donc d’un cycle eulérien. Par le théorème d’Euler–Hierholzer, GG n’a donc que des valences paires, ce qui est en contradiction avec le fait que GG est le graphe complet sur SS sommets.

Si la MNC restant a longueur 33, alors la MC a longueur A+1A+1 et il existe précisément une arête dans GG qui soit parcourue dans les deux sens par la MC. Soit GG^{\prime} le sous-graphe obtenu en retirant cette arête. GG^{\prime} est ainsi un graphe ordinaire dont l’ensemble des arêtes est partitionné par les ff MNC de longueur 33 de GG. Cette observation implique que tous les sommets de GG^{\prime} ont valence paire ; par conséquent, GG n’a que deux sommets de valence impaire. Puisque S>2S>2, il s’agit encore d’une contradiction.

Bref, un tel graphe GG n’existe pas, d’où Vc(g)<br(g)V_{c}(g)<b_{r}(g).

6.2. Démonstration de la partie (b)

Nous procédons par analyse-synthèse : nous identifions d’abord diverses propriétés des graphes qui peuvent réaliser la borne b(g)b(g), puis nous montrons qu’il existe de tels graphes pour les SS annoncés.

6.2.1. Analyse

Le résultat suivant est notre boussole :

Proposition 6.1.

Soient g1g\geq 1 et GΣgG\subset\Sigma_{g} un graphe généralisé, plongé cellulairement, avec MC, satisfaisant la condition (C) et tel que Vr(G)=b(g)V_{r}(G)=b(g). Alors GG est un graphe complet à SS sommets, S1 ou 3 mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\mbox{ mod }6 et g=(S1)(S3)/6g=(S-1)(S-3)/6. De plus, la MC de GG est un cycle eulérien et les MNC ont toutes longueur 33.

Proof.

Par hypothèse et par (\diamondsuit), b(g)=Vr(G)V(G)3+(6g3)/Sb(g)=V_{r}(G)\leq V(G)\leq 3+(6g-3)/S. Ainsi, 1+6g(2+(6g3)/S)21+6g\leq(2+(6g-3)/S)^{2}, et comme g1g\geq 1 ceci implique S24S(6g3)0S^{2}-4S-(6g-3)\leq 0, c’est-à-dire S2+1+6g=1+Vr(G)S\leq 2+\sqrt{1+6g}=1+V_{r}(G). Puisque (r\clubsuit_{r}) stipule l’inégalité opposée, nous obtenons S=1+Vr(G)=2+1+6gS=1+V_{r}(G)=2+\sqrt{1+6g} et donc aussi V(G)=Vr(G)V(G)=V_{r}(G). D’une part, ceci implique que GG est un graphe ordinaire et complet. D’autre part, puisque gg est entier, (S2)2=1+6g(S-2)^{2}=1+6g est impair et donc SS est impair. De plus, g=(S1)(S3)/6g=(S-1)(S-3)/6, donc S1 ou 3 mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\mbox{ mod }6.

Il s’ensuit aussi que A(G)=3(S1)/2+3gA(G)=3(S-1)/2+3g. Par la formule d’Euler, nous trouvons que GG possède f:=F1=(S1)/2+g=A/3f:=F-1=(S-1)/2+g=A/3 MNC. Par la condition (C) et la définition de la MC, nous déduisons que les MNC parcourent (dans un seul sens) précisément 3f=A3f=A arêtes non orientées distinctes, c’est-à-dire toutes les arêtes de GG. Ceci montre que les ff MNC ont toutes longueur 33 et que la MC, ayant longueur AA, est un cycle eulérien.   \square

L’idée pour démontrer le 1.12(b) consiste donc, étant donné un S1 ou 3 mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\mbox{ mod }6 convenable, à trouver une polarisation du graphe complet KSK_{S} qui admette une MC qui soit un cycle eulérien et dont toutes les MNC aient longueur 33. En effet, le théorème fondamental des plongements cellulaires se chargerait ensuite de plonger KSK_{S} cellulairement dans la surface Σg\Sigma_{g} appropriée.

Il importe de souligner qu’il n’y a aucune obstruction évidente à l’existence d’une telle polarisation, quel que soit S1 ou 3 mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\mbox{ mod }6. D’un côté, pour SS est impair, le théorème d’Euler–Hierholzer assure que KSK_{S} admet un cycle eulérien. Il s’avère que tout cycle eulérien permet de définir une polarisation ayant ce cycle pour MC, mais une telle polarisation n’a pas forcément des MNC de longueur 33. D’un autre côté, c’est un fait classique que S1 ou 3 mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\mbox{ mod }6 est la condition nécessaire et suffisante pour que KSK_{S} admette un système de triples de Steiner, c’est-à-dire une partition de l’ensemble de ses arêtes en 33-cycles (une preuve simple de ce fait se trouve dans [S2]). Il s’avère que tout système de triples de Steiner sur KSK_{S} permet de définir une polarisation ayant ces triples d’arêtes parmi ses MNC, mais une telle polarisation n’a pas forcément de MC.

Notre défi consiste donc à réconcilier ces deux facettes en trouvant un cycle eulérien et un système de triples de Steiner qui soient compatibles en ce sens qu’ils proviennent d’une polarisation ayant le cycle eulérien pour MC et les triples de Steiner pour MNC. Notre stratégie pour y parvenir est une généralisation de la stratégie derrière la construction des graphes des figures 11 et 12. (En fait, la 5.10 n’est nulle autre que le cas particulier S=7S=7 du 1.12(b).) Nous synthétiserons le résultat suivant :

Proposition 6.2.

Soit GG un graphe ordinaire avec SS impair plongé cellulairement dans Σg\Sigma_{g}, qui a une MC et qui sature la borne (\diamondsuit). Alors la MC de GG est un cycle eulérien et les MNC ont toutes longueur 33. De plus, il existe un polygone Π\Pi à 4f=4g+2(S1)4f=4g+2(S-1) côtés ayant les propriétés suivantes :

  1. (i)

    Il y a 2f2f côtés indicés a1,,a2fa_{1},\ldots,a_{2f} et orientés selon le sens antihoraire. Leur position dans Π\partial\Pi est contrainte comme suit : pour chaque j=1,,fj=1,\ldots,f, les côtés a2j1a_{2j-1} et a2ja_{2j} sont consécutifs dans Π\partial\Pi suivant le sens antihoraire.

  2. (ii)

    Les 2f2f côtés restants sont indicés a¯1,,a¯2f\bar{a}_{1},\ldots,\bar{a}_{2f} et orientés selon le sens horaire de Π\partial\Pi.

  3. (iii)

    Pour chaque j=1,,fj=1,\dots,f, il y a un segment plongé djd_{j} joignant dans int(Π)\mathrm{int}(\Pi) la source de a2j1a_{2j-1} et la cible de a2ja_{2j}, et orienté de la sorte. Les djd_{j} sont ne peuvent s’intersecter qu’aux coins de Π\Pi.

La surface Σg\Sigma_{g} est obtenue comme quotient de Π\Pi en identifiant, pour tout k=1,,2fk=1,\ldots,2f, les côtés aka_{k} et a¯k\bar{a}_{k} de façon à ce que les deux côtés induisent une même orientation sur le segment eke_{k} résultant. Le graphe GΣgG\subset\Sigma_{g} est alors donné par l’union (1k2fek)(1jfdj)(\bigcup_{1\leq k\leq 2f}e_{k})\cup(\bigcup_{1\leq j\leq f}d_{j}). Les MNC de (G,P)(G,P) sont les cycles [a2j1,a2j,d¯j][a_{2j-1},a_{2j},\bar{d}_{j}] (j=1,,fj=1,\ldots,f) et la MC est le bord de la 22-cellules dans Π\Pi délimitées par les djd_{j} et les a¯k\bar{a}_{k} parcouru dans le sens antihoraire.

Proof.

Par saturation de (\diamondsuit), A=3(S1)/2+3gA=3(S-1)/2+3g. Par la formule d’Euler, GG possède f:=F1=(S1)/2+g=A/3f:=F-1=(S-1)/2+g=A/3 MNC, qui parcourent précisément 3f=A3f=A arêtes. Bref, toutes les MNC ont longueur 33 et la MC, ayant longueur AA, est un cycle eulérien.

Chaque arête non orientée de GG apparaît précisément dans une seule MNC. Par le théorème fondamental des plongements polarisés (1.1), nous pouvons exprimer Σg\Sigma_{g} sous la forme d’un CW-complexe dont GG est le 11-squelette et qui a F=f+1F=f+1 22-cellules collées à GG suivant chacune une marche à gauche de GG. Le reste de la démonstration consiste simplement à décrire ce recollement de ces 22-cellules le long de GG en différentes étapes.

Les ff 22-cellules associées aux MNC être interprétées comme étant des polygones Πj\Pi_{j} à 33 côtés (j=1,,fj=1,\dots,f), et la 22-cellule associée à la MC comme étant un polygone Π0\Pi_{0} à A=3fA=3f côtés. Pour chaque Πj\Pi_{j} avec 1jf1\leq j\leq f, nous sélectionnons un côté que nous notons d¯j\bar{d}^{\prime}_{j} (orienté selon le sens antihoraire de Πj\partial\Pi_{j}). Ces ff segments correspondent à ff arêtes distinctes dj′′d^{\prime\prime}_{j} dans GG et appartiennent à des MNC distinctes ; ces arêtes sont parcourues en sens inverse par la MC. Ainsi, il y a ff côtés de Π0\Pi_{0} qui correspondent à ces arêtes inversées ; nous notons ces côtés djd^{\prime}_{j} et nous les orientons selon le sens antihoraire de Π0\partial\Pi_{0}.

Pour chaque j=1,,fj=1,\ldots,f, nous collons Πj\Pi_{j} le long de Π0\Pi_{0}, par identification du côté d¯jΠj\bar{d}^{\prime}_{j}\subset\partial\Pi_{j} et du côté djΠ0d^{\prime}_{j}\subset\partial\Pi_{0}, de sorte que le segment résultant djd_{j} ait l’orientation de djd^{\prime}_{j} et l’orientation inverse de d¯j\bar{d}^{\prime}_{j}. Nous obtenons ainsi le polygone Π\Pi à 4f4f côtés.

Pour j=1,,fj=1,\ldots,f, les deux côtés restants de ΠjΠ\Pi_{j}\subset\Pi sont nommés (dans l’ordre antihoraire) a2j1a_{2j-1} et a2ja_{2j}. Tous ces côtés aka_{k} sont en bijection avec les arêtes de G{d1′′,,df′′}G\setminus\{d^{\prime\prime}_{1},\ldots,d^{\prime\prime}_{f}\} ; ces arêtes sont parcourues en sens inverse par la MC. Il y a donc une bijection entre l’ensemble des aka_{k} et l’ensemble des côtés encore non indicés de Π0\Pi_{0} ; nous notons aka¯ka_{k}\mapsto\bar{a}_{k} cette bijection.

Ainsi, en collant chaque côté aka_{k} de Π\Pi au côté a¯k\bar{a}_{k} correspondant, nous aboutissons à la même structure de CW-complexe sur Σg\Sigma_{g}.   \square

6.2.2. Stratégie de synthèse

Notre stratégie pour démontrer le 1.12(b) vise, pour tout S1 ou 3 mod 6S\equiv 1\mbox{ ou }3\mbox{ mod }6 convenable et g=(S1)(S3)/6g=(S-1)(S-3)/6, à exprimer explicitement Σg\Sigma_{g} comme un quotient d’un polygone Π\Pi à 4f=4g+2(S1)4f=4g+2(S-1) côtés et décoré de ff diagonales d1,,dfd_{1},\ldots,d_{f} (conformément aux points (i)–(ii)–(iii) ci-dessus) de façon à ce que KSΣgK_{S}\subset\Sigma_{g} soit donné par G:=(1m2fem)(1nfdn)G:=(\bigcup_{1\leq m\leq 2f}e_{m})\cup(\bigcup_{1\leq n\leq f}d_{n}).

L’enjeu ici consiste à ordonner les indices a1,,a¯2fa_{1},\ldots,\bar{a}_{2f} le long de Π\partial\Pi de façon à ce que le quotient donne bien la surface Σg\Sigma_{g} et le graphe KSK_{S}. Cela revient à construire une valuation vv appropriée qui associe à chaque coin de Π\Pi un sommet de KSK_{S}. Nous détaillons notre stratégie en quelques étapes.

Étape 1 : Nous faisons l’ansatz suivant : les côtés a1a_{1} à a2fa_{2f} sont consécutifs, dans le sens antihoraire. Ainsi, le bord Π\partial\Pi est divisé en deux hémisphères, l’un contenant tous les ama_{m} et l’autre contenant tous les a¯m\bar{a}_{m}.

Comme dans les figures 11 et 12, il nous sera utile de penser au polygone Π\Pi comme étant deux lignes horizontales alignées une au-dessus de l’autre pour former un rectangle. Les 2f2f côtés a¯m\bar{a}_{m} de Π\Pi sont distribués sur la face du haut (suivant un ordre encore à identifier) et les 2f2f côtés a1,,a2f+1a_{1},\ldots,a_{2f+1} sont consécutivement distribués, de gauche à droite, sur la face du bas. Les diagonales dnd_{n} sont tracées en demi-lunes afin de former ff triples d’arêtes (a2n1,a2n,dn)(a_{2n-1},a_{2n},d_{n}). Notons que la face du bas du rectangle a 2f+12f+1 « coins », dénotés de gauche à droite p1,p2,,p2fp_{1},p_{2},\dots,p_{2f}, de sorte que a2n1=p2n1p2na_{2n-1}=p_{2n-1}p_{2n}, a2n=p2np2n+1a_{2n}=p_{2n}p_{2n+1} et dn=p2n1p2n+1d_{n}=p_{2n-1}p_{2n+1}. Nous étiquetons de gauche à droite p1,,p2f+1p^{\prime}_{1},\dots,p^{\prime}_{2f+1} les « coins » de la face du haut du rectangle et nous posons am:=pmpm+1a^{\prime}_{m}:=p^{\prime}_{m}p^{\prime}_{m+1} (m=1,,2fm=1,\ldots,2f). Les côtés verticaux gauche et droite du rectangle sont des artéfacts de la présentation rectangulaire ; nous y inscrivons des signes d’égalité pour souligner que les extrémités de gauche p1p_{1} et p1p^{\prime}_{1} correspondent à un même coin de Π\Pi et similairement pour les extrémités de droite p2f+1p_{2f+1} et p2f+1p^{\prime}_{2f+1}.

Étape 2 : Nous choisissons un système de triples de Steiner sur l’ensemble des SS sommets de KSK_{S} ; observons qu’un tel système consiste en A/3=fA/3=f triples de sommets. Nous associons ensuite à chacun des coins pmp_{m} du rectangle un sommet v(pm)KSv(p_{m})\in K_{S}, de façon à ce que les ff triples (v(p2n1),v(p2n),v(p2n+1))(v(p_{2n-1}),v(p_{2n}),v(p_{2n+1})) (j=n,,f)j=n,\ldots,f) correspondent, dans un certain ordre, aux ff triples du système de Steiner choisi. Dans la pratique, nous imposerons toujours v(p1)=v(p2f+1)v(p_{1})=v(p_{2f+1}).

Cette valuation pmv(pm)p_{m}\mapsto v(p_{m}) détermine une application de l’ensemble des côtés (orientés) ama_{m} et des diagonales (orientées) dnd_{n} vers l’ensemble des arêtes orientées de KSK_{S}, à savoir (pm,pm)v(pm,pm)=(v(pm),v(pm))𝒜orient(KS)(p_{m},p_{m^{\prime}})\mapsto v(p_{m},p_{m^{\prime}})=(v(p_{m}),v(p_{m^{\prime}}))\in\mathcal{A}_{orient}(K_{S}). Par définition d’un système de Steiner, l’application obtenue en oubliant l’orientation, (pm,pm)v(pm,pm)={v(pm),v(pm)}𝒜(KS)(p_{m},p_{m^{\prime}})\mapsto v(p_{m},p_{m^{\prime}})=\{v(p_{m}),v(p_{m^{\prime}})\}\in\mathcal{A}(K_{S}), s’avère injective.

Étape 3 : Nous associons à chacun des coins pmp^{\prime}_{m} un sommet v(pm)KSv(p^{\prime}_{m})\in K_{S}. Ceci induit une application am=(pm,pm+1)v(am)=(v(pm),v(pm+1))𝒜orient(KS)a^{\prime}_{m}=(p^{\prime}_{m},p^{\prime}_{m+1})\mapsto v(a^{\prime}_{m})=(v(p^{\prime}_{m}),v(p^{\prime}_{m+1}))\in\mathcal{A}_{orient}(K_{S}). L’association vv doit respecter diverses contraintes :

  1. (1)

    Puisque p1p_{1} et p1p^{\prime}_{1} incarnent le même coin de Π\Pi, nous exigeons v(p1)=v(p1)KSv(p_{1})=v(p^{\prime}_{1})\in K_{S}. Similairement, v(p2f+1)=v(p2f+1)KSv(p_{2f+1})=v(p^{\prime}_{2f+1})\in K_{S}. (Comme nous le mentionnons, en pratique, le même sommet de KSK_{S} sera associé à ces quatre coins.)

  2. (2)

    Nous exigeons que les ensembles {v(am)}1m2f\{v(a_{m})\}_{1\leq m\leq 2f} et {v(am)}1m2f\{v(a^{\prime}_{m})\}_{1\leq m\leq 2f} soient identiques dans 𝒜orient(KS)\mathcal{A}_{orient}(K_{S}). Comme la valuation est injective sur les arêtes a1,,a2fa_{1},\ldots,a_{2f}, il existe une bijection ϕ:{1,,2f}\phi:\{1,\ldots,2f\}\circlearrowleft telle que v(am)=v(aϕ(m))v(a_{m})=v(a^{\prime}_{\phi(m)}). Nous posons alors a¯m:=aϕ(m)\bar{a}_{m}:=a^{\prime}_{\phi(m)}. (Cette condition est requise par la 6.2.)

  3. (3)

    Nous souhaitons que la bijection ϕ\phi soit suffisamment mélangeante – en un sens que nous précisons à l’Étape 4 – pour que le polygone Π\Pi donne bien la surface Σg\Sigma_{g} et le graphe KSK_{S} après recollement. En particulier, nous exigeons v(a1)v(a1)v(a^{\prime}_{1})\neq v(a_{1}), v(a2f)v(a2f)v(a^{\prime}_{2f})\neq v(a_{2f}) et ϕ(m+1)ϕ(m)+1\phi(m+1)\neq\phi(m)+1 pour tout 1m2f11\leq m\leq 2f-1, c’est-à-dire qu’aucune séquence de côtés consécutifs du type (a¯m,a¯m+1)(\bar{a}_{m},\bar{a}_{m+1}) n’apparaît en haut du rectangle. (Ces dernières conditions sont nécessaires pour obtenir le graphe KSK_{S} après recollement ; sans elles, le graphe obtenu aurait des sommets de valence 22 ou 44 et il ne s’agirait donc pas de KSK_{S}S1 mod 6S\equiv 1\mbox{ mod }6.)

Étape 4 : Le résultat de la dernière étape est une séquence (a1,,a2f)=(a¯ϕ1(1),,a¯ϕ1(2f))(a^{\prime}_{1},\ldots,a^{\prime}_{2f})=(\bar{a}_{\phi^{-1}(1)},\ldots,\bar{a}_{\phi^{-1}(2f)}), encodée simplement sous la forme (ϕ1(1),,ϕ1(2f))(\phi^{-1}(1),\ldots,\phi^{-1}(2f)). Cette séquence détermine un certain quotient Σ\Sigma de Π\Pi en identifiant les côtés ama_{m} aux côtés a¯m\bar{a}_{m}, ainsi qu’un certain graphe GΣG\subset\Sigma ayant pour arêtes les images des ama_{m} et des dnd_{n}. Il ne nous reste plus qu’à vérifier si Σ=Σg\Sigma=\Sigma_{g} et si G=KSG=K_{S}. Pour ce faire, il suffit de vérifier si les coins de Π\Pi donnent lieu à précisément SS sommets distincts dans le quotient.

En effet, d’une part, la surface Σ\Sigma est compacte et orientée. Soit SS^{\prime} le nombre de points que les coins de Π\Pi définissent dans Σ\Sigma ; soient eme_{m} (1m2f1\leq m\leq 2f) les images dans Σ\Sigma des segments ama_{m}. La surface Σ\Sigma admet ainsi une structure de CW-complexe composée d’une 22-cellule (l’intérieur de Π\Pi), de 2f2f 11-cellules (les eme_{m}) et de SS^{\prime} 0-cellules (les images des coins de Π\Pi). Comme f=(S1)/2+gf=(S-1)/2+g, par la formule d’Euler, il en résulte que Σ=Σg\Sigma=\Sigma_{g} si et seulement si S=SS^{\prime}=S.

D’autre part, soient qq et qq^{\prime} deux coins de Π\Pi qui sont identifiés dans le quotient. Supposons que qq débute (pour une certaine orientation) un côté c1c_{1} de Π\Pi. Alors il existe une chaîne de coins q1=q,q2,,qn=qq_{1}=q,q_{2},\dots,q_{n}=q^{\prime}q2q_{2} débute c¯1\bar{c}_{1} et débute (pour une certaine orientation) un autre côté c2c_{2} de Π\Pi, q3q_{3} débute le côté c¯2\bar{c}_{2} et débute (pour une certaine orientation) un côté c3c_{3}, etc. Par la condition (2) de l’Étape 3, si qq et qq^{\prime} sont liés par une telle chaîne, alors v(q)=v(q)v(q)=v(q^{\prime}). Donc SSS^{\prime}\geq S et KSK_{S} est le quotient de GG obtenu en identifiant les sommets de GG de même valuation vv. Il en résulte que G=KSG=K_{S} si et seulement si S=SS^{\prime}=S.

Le critère S=SS^{\prime}=S permet d’éclaircir la signification de la condition (3) de l’Étape 3 : il faut que la bijection ϕ\phi soit suffisamment mélangeante pour que v(q)=v(q)v(q)=v(q^{\prime}) seulement si les coins qq et qq^{\prime} sont identifiés dans le quotient.

6.3. Synthèse

Pour S=93 mod 6S=9\equiv 3\mbox{ mod }6, donc pour g=8g=8 et f=12f=12, en employant le système de Steiner décrit dans [S2, §3\S 3], nous avons trouvé la solution (ϕ1(k))1k24(\phi^{-1}(k))_{1\leq k\leq 24} suivante :

(19,11,23,6,21,15,20,7,13,10,16,5,14,2,9,24,1,22,4,17,8,3,12,18).(19,11,23,6,21,15,20,7,13,10,16,5,14,2,9,24,1,22,4,17,8,3,12,18)\,.

Nous laissons au lecteur le soin de confirmer qu’il s’agit bien d’une solution, c’est-à-dire de vérifier que S=S=9S^{\prime}=S=9.

Considérons maintenant S=6k+1S=6k+1 premier où k=2l+1k=2l+1 est impair, bref S=12l+7S=12l+7 (l0l\geq 0). Nous pouvons alors construire des solutions en raffinant la stratégie précédente : nos hypothèses sur SS et les solutions des articles [S1, O] nous serviront à former des systèmes de Steiner (décrits dans [S2, §2\S 2]) qui faciliteront l’obtention de valuations vv appropriées.

Nous aurons besoin des deux lemmes suivants :

Lemme 6.3 ([S2]).

Pour tout entier k1k\geq 1, il existe 3k3k entiers {αj,βj,γj}1jk\{\alpha_{j},\beta_{j},\gamma_{j}\}_{1\leq j\leq k}\subset\mathbb{Z} tels que :

  • \bullet

    Les 3k3k éléments sont distincts, non nuls et compris entre 11 et 3k+13k+1.

  • \bullet

    Aucune paire de ces éléments ne somme à 6k+16k+1. Autrement dit, un seul des deux entiers 3k3k et 3k+13k+1 apparaît parmi les 3k3k éléments.

  • \bullet

    j=αj<βj<γjj=\alpha_{j}<\beta_{j}<\gamma_{j} et αj+βj=γj\alpha_{j}+\beta_{j}=\gamma_{j} pour tout 1jk1\leq j\leq k.

Proof.

Posons αj=j\alpha_{j}=j, βj=βjk\beta^{\prime}_{j}=\beta_{j}-k et γj=γjk\gamma^{\prime}_{j}=\gamma_{j}-k. Le problème consiste alors à trouver 2k2k entiers distincts {βj,γj}1jk\{\beta^{\prime}_{j},\gamma^{\prime}_{j}\}_{1\leq j\leq k} entre 11 et 2k+12k+1 tels que γjβj=j\gamma^{\prime}_{j}-\beta^{\prime}_{j}=j pour tout 1jk1\leq j\leq k et tels qu’un seul des entiers 2k2k et 2k+12k+1 apparaisse parmi ces 2k2k entiers. Skolem [S1] a montré que de tels entiers existent, aucun égal à 2k+12k+1, si et seulement si k0 ou 1 modulo 4k\equiv 0\mbox{ ou }1\mbox{ modulo }4 ; O’Keefe [O] a montré que de tels entiers existent, aucun égal à 2k2k, si et seulement si k2 ou 3 modulo 4k\equiv 2\mbox{ ou }3\mbox{ modulo }4.   \square

Lemme 6.4.

Soient {αj,βj,γj}1jk\{\alpha_{j},\beta_{j},\gamma_{j}\}_{1\leq j\leq k}\subset\mathbb{Z} comme dans le 6.3. Supposons que S:=6k+1S:=6k+1 soit premier. Alors les sommes α:=j=1kαj\alpha:=\sum_{j=1}^{k}\alpha_{j}, β:=j=1kβj\beta:=\sum_{j=1}^{k}\beta_{j} et γ:=j=1kγj\gamma:=\sum_{j=1}^{k}\gamma_{j} sont copremiers avec SS.

Proof.

Posons r=0r=0 si si k0 ou 1 modulo 4k\equiv 0\mbox{ ou }1\mbox{ modulo }4 et r=1r=1 sinon. Puisque SS est premier, il suffit de montrer que SS ne divise aucune des sommes. Il est clair que le nombre premier SS ne divise pas α=k(k+1)/2\alpha=k(k+1)/2. Ensuite, observons que

2γ=α+β+γ=r+3k(3k+1)2=r+(S1)(S+1)8.2\gamma=\alpha+\beta+\gamma=r+\dfrac{3k(3k+1)}{2}=r+\dfrac{(S-1)(S+1)}{8}\,.

Il est clair que SS ne divise pas γ\gamma si r=0r=0. Si r=1r=1, alors SS divise γ\gamma seulement si SS divise S2+7S^{2}+7, donc seulement si S=7S=7, ce qui oblige k=1k=1 et donc r=0r=0 ; bref, SS ne divise pas γ\gamma si r=1r=1. Finalement, nous avons

β=γα=7S28S+1+72r144.\beta=\gamma-\alpha=\dfrac{7S^{2}-8S+1+72r}{144}\,.

Il est clair que SS ne divise pas β\beta si r=0r=0. Si r=1r=1, alors SS divise β\beta seulement si S=73S=73, ce qui oblige k=12k=12 et donc r=0r=0 ; bref, SS ne divise pas β\beta si r=1r=1.   \square

Étape 1 : Soit S=6k+1S=6k+1 (k1k\geq 1), de sorte que g=k(6k2)g=k(6k-2) et f=k(6k+1)=kSf=k(6k+1)=kS. Notre rectangle Π\Pi de longueur 2f2f est donc la concaténation de kk sous-rectangles Πj\Pi_{j} (j=1,,kj=1,\dots,k) de longueur 2S2S chacun, où le sous-rectangle Πj\Pi_{j} est formé par les segments horizontaux (p2S(j1)+1,,p2Sj+1)(p_{2S(j-1)+1},\dots,p_{2Sj+1}) et (p2S(j1)+1,,p2Sj+1)(p^{\prime}_{2S(j-1)+1},\dots,p^{\prime}_{2Sj+1}) et est décoré des arcs dS(j1)+1,,dSjd_{S(j-1)+1},\ldots,d_{Sj}.

Pour la suite des choses, fixons un étiquettage 0,,S10,\dots,S-1 des sommets de KSK_{S}. Il nous sera utile de penser à ces étiquettes comme étant les éléments de /S\mathbb{Z}/S\mathbb{Z}.

Étape 2 : Nous allons construire le système de Steiner sur KSK_{S} et la valuation vv sur les p1,,p2f+1p_{1},\dots,p_{2f+1} simultanément. Tel que montré dans [S2, §2\S 2], le 6.3 permet de construire un système de Steiner sur KSK_{S} quel que soit S=6k+1S=6k+1. Ainsi, le système de triples de Steiner que nous nous apprêtons à construire quand SS est premier n’est qu’un cas particulier de la construction donnée par Skolem, mais il a le mérite d’admettre une structure particulièrement régulière, ce qui nous aidera à accomplir les autres Étapes de notre stratégie.

Pour 1jk1\leq j\leq k, considérons le rectangle Πj\Pi_{j}, dont les « coins » de la face inférieure sont p2S(j1)+1,,p2Sj+1p_{2S(j-1)+1},\dots,p_{2Sj+1}. Considérons aussi le triple (αj,βj,γj)(\alpha_{j},\beta_{j},\gamma_{j}) donné par le 6.3, que nous interprétons comme sous-ensemble de /S\mathbb{Z}/S\mathbb{Z}. Nous définissons une valuation vjv_{j} de ces coins dans 𝒮(KS)=/S\mathcal{S}(K_{S})=\mathbb{Z}/S\mathbb{Z} par les deux règles suivantes :

  1. (i)

    vj(p2S(j1)+1)=0v_{j}(p_{2S(j-1)+1})=0.

  2. (ii)

    vj(pm+1)=vj(pm)+αjv_{j}(p_{m+1})=v_{j}(p_{m})+\alpha_{j} si mm est impair et vj(pm+1)=vj(pm)+βjv_{j}(p_{m+1})=v_{j}(p_{m})+\beta_{j} si mm est pair.

Ces règles impliquent vj(pm+2)=vj(pm)+γjv_{j}(p_{m+2})=v_{j}(p_{m})+\gamma_{j} pour tout 2S(j1)+1m2Sj12S(j-1)+1\leq m\leq 2Sj-1. En particulier, vj(p2Sj+1)=vj(p2S(j1)+1)+Sγj=0=vj+1(p2Sj+1)v_{j}(p_{2Sj+1})=v_{j}(p_{2S(j-1)+1})+S\gamma_{j}=0=v_{j+1}(p_{2Sj+1}). Ceci prouve que les divers vjv_{j} déterminent ensemble une valuation vv sur la face inférieure de Π\Pi.

Pour chaque 1jk1\leq j\leq k, du fait que γj\gamma_{j} est copremier avec SS, il se trouve que les SS valeurs vj(p2S(j1)+2m1)KSv_{j}(p_{2S(j-1)+2m-1})\in K_{S} (1mS1\leq m\leq S) sont distinctes ; elles énumèrent donc tous les sommets de KSK_{S} sans répétition. Il en va de même des sommets vj(p2S(j1)+2m)v_{j}(p_{2S(j-1)+2m}) (1mS1\leq m\leq S), puisque cet ensemble n’est qu’une translation de l’ensemble précédent. Donc chaque sommet vKSv\in K_{S} apparait précisément deux fois parmi les p2S(j1)+mp_{2S(j-1)+m} (1m2S1\leq m\leq 2S), en fait pour deux mm de parités différentes.

À ce point-ci et en prévision des Étapes suivantes, il convient de dire qu’un côté ama_{m} de Πj\Pi_{j} est « un côté αj\alpha_{j} » si mm est impair et est « un côté βj\beta_{j} » si mm est pair ; cette terminologie reflète simplement la différence de valuations entre les extrémités droite et gauche de ama_{m}. Le paragraphe précédent implique donc que pour chaque sommet vKSv\in K_{S} et chaque 1jk1\leq j\leq k, il y a parmi les côtés αj\alpha_{j} un seul côté αj(v)\alpha_{j}(v) qui débute par vv et un seul (autre) côté αj(v)\alpha^{\prime}_{j}(v) qui termine par vv ; similairement, parmi les côtés βj\beta_{j}, il y a un seul côté βj(v)\beta_{j}(v) qui débute par vv et un seul (autre) côté βj(v)\beta^{\prime}_{j}(v) qui termine par vv. Conséquemment, pour tout vKSv\in K_{S} et tout 1jk1\leq j\leq k, parmi les diagonales dS(j1)+nd_{S(j-1)+n} (1nS1\leq n\leq S), il y en a une seule qui débute par vv et il y en a une seule autre qui termine par vv.

Nous affirmons que l’ensemble {(v(p2m1),v(p2m),v(p2m+1)}1mf\{(v(p_{2m-1}),v(p_{2m}),v(p_{2m+1})\}_{1\leq m\leq f}, c’est-à-dire l’ensemble des triplets de valuation des coins des ff demi-lunes de Π\Pi, est un système de triples de Steiner de KSK_{S}. Cela découle du paragraphe précédent et de [S2, §2\S 2]. Alternativement, il suffit de vérifier que la valuation induite sur les côtés ama_{m} et les diagonales dnd_{n} à valeurs dans 𝒜(KS)\mathcal{A}(K_{S}) est injective. Soient (pm,pm)(p_{m},p_{m^{\prime}}) et (pl,pl)(p_{l},p_{l^{\prime}}) (mm,ll{1,2}m^{\prime}-m,l^{\prime}-l\in\{1,2\}) deux segments distincts ayant la même valuation, c’est-à-dire que {v(pm),v(pm)}={v(pl),v(pl)}𝒜(KS)\{v(p_{m}),v(p_{m^{\prime}})\}=\{v(p_{l}),v(p_{l^{\prime}})\}\in\mathcal{A}(K_{S}).

  • \bullet

    La possibilité v(pm)=v(pl)v(p_{m})=v(p_{l^{\prime}}) et v(pm)=v(pl)v(p_{m^{\prime}})=v(p_{l}) est exclue. Autrement, nous aurions v(pm)v(pm)=(v(pl)v(pl))v(p_{m^{\prime}})-v(p_{m})=-(v(p_{l^{\prime}})-v(p_{l})) et v(pm)v(pm),v(pl)v(pl){αj,βj,γj}1jk/Sv(p_{m^{\prime}})-v(p_{m}),v(p_{l^{\prime}})-v(p_{l})\in\{\alpha_{j},\beta_{j},\gamma_{j}\}_{1\leq j\leq k}\subset\mathbb{Z}/S\mathbb{Z}, de sorte que deux des α1,,γk\alpha_{1},\ldots,\gamma_{k} aurait une somme nulle dans /S\mathbb{Z}/S\mathbb{Z}, ce qui est absurde.

  • \bullet

    Donc v(pm)=v(pl)v(p_{m})=v(p_{l}) et v(pm)=v(pl)v(p_{m^{\prime}})=v(p_{l^{\prime}}). Ainsi v(pm)v(pm)=v(pl)v(pl){αj,βj,γj}1jkv(p_{m^{\prime}})-v(p_{m})=v(p_{l^{\prime}})-v(p_{l})\in\{\alpha_{j},\beta_{j},\gamma_{j}\}_{1\leq j\leq k}. Donc les segments pmpmp_{m}p_{m^{\prime}} et plplp_{l}p_{l^{\prime}} appartiennent au même rectangle Πj\Pi_{j}, sont tous les deux des ama_{m} et des dld_{l} et sont ainsi en fait égaux.

Refer to caption
Figure 15. Illustration du rectangle Πj\Pi_{j} apparaissant dans l’étape 2 de la Synthèse. La valeur de la valuation sur les « coins » est indiquée en gris.

Étape 3 : Nous définissons la valuation vv sur les pmp^{\prime}_{m} (1m2f+11\leq m\leq 2f+1) à valeurs dans 𝒮(KS)\mathcal{S}(K_{S}) comme suit. D’abord, posons v1:=v(p1)=0v_{1}:=v(p^{\prime}_{1})=0. Ensuite, pour m2m\geq 2, nous définissons vm:=v(pm)v_{m}:=v(p^{\prime}_{m}) par récurrence comme suit (rappelons que f=kSf=kS) :

  1. (i)

    Si 1mf1\leq m\leq f et mj mod km\equiv j\mbox{ mod }k, alors vm+1:=vm+βjv_{m+1}:=v_{m}+\beta_{j}. Autrement dit, (vm,vm+1):=v(βj(vm))(v_{m},v_{m+1}):=v(\beta_{j}(v_{m})), d’où am=βj(vm)¯a^{\prime}_{m}=\overline{\beta_{j}(v_{m})}.

  2. (ii)

    Si f+1m2ff+1\leq m\leq 2f et mj mod km\equiv j\mbox{ mod }k, alors vm+1:=vm+αjv_{m+1}:=v_{m}+\alpha_{j}. Autrement dit, (vm,vm+1):=v(αj(vm))(v_{m},v_{m+1}):=v(\alpha_{j}(v_{m})), d’où am=αj(vm)¯a^{\prime}_{m}=\overline{\alpha_{j}(v_{m})}.

Concrètement, les ff côtés ama^{\prime}_{m} qui forment la moitié gauche de la face supérieure de Π\Pi sont choisis parmi les β\beta de la face inférieure, plus précisément dans un ordre (cyclique sur les indices) β1,β2,,βk\beta_{1},\beta_{2},\dots,\beta_{k}, tandis que les ff côtés ama^{\prime}_{m} qui forment la moitié droite de la face supérieure de Π\Pi sont choisis parmi les α\alpha de la face inférieure, plus précisément dans un ordre (cyclique sur les indices) α1,α2,,αk\alpha_{1},\alpha_{2},\dots,\alpha_{k}.

Nous vérifions que cette valuation respecte les trois contraintes énoncées :

  1. (1)

    Par définition, v(p1)=v(p1)=0v(p^{\prime}_{1})=v(p_{1})=0. Par ailleurs, v(p2f+1)=v(p1)+Sβ+Sα=0=v(p2f+1)v(p^{\prime}_{2f+1})=v(p^{\prime}_{1})+S\beta+S\alpha=0=v(p_{2f+1}). Observons aussi au passage que la valeur du coin milieu de la face supérieure est v(p1+f)=v(p1)+Sβ=0v(p^{\prime}_{1+f})=v(p^{\prime}_{1})+S\beta=0.

  2. (2)

    En raison du 6.4, β\beta et α\alpha sont copremiers à SS. Cela implique que les SS valeurs v(p1+km)v(p^{\prime}_{1+km}) (0mS10\leq m\leq S-1) sont distinctes dans 𝒮(KS)\mathcal{S}(K_{S}) et donc qu’elles énumèrent tous les sommets de KSK_{S} sans répétition, tout comme les SS valeurs v(p1+km)v(p^{\prime}_{1+km}) (Sm2S1S\leq m\leq 2S-1) sont distinctes dans 𝒮(KS)\mathcal{S}(K_{S}) et qu’elles énumèrent donc aussi tous les sommets de KSK_{S} sans répétition. Par translation, il en va de même pour tous les ensembles {v(pj+km)}0mS1\{v(p^{\prime}_{j+km})\}_{0\leq m\leq S-1} et {v(pj+km)}Sm2S1\{v(p^{\prime}_{j+km})\}_{S\leq m\leq 2S-1} (1jk1\leq j\leq k). Cela signifie que pour tout 1jk1\leq j\leq k, tous les côtés βj\beta_{j} (respectivement, tous les côtés αj\alpha_{j}) apparaissent une et une seule fois à gauche (respectivement, à droite) de la face supérieure de Π\Pi. Cela démontre l’existence de la bijection ϕ\phi.

  3. (3)

    Nous montrerons à l’Étape (4) que ϕ\phi est suffisamment mélangeante. Pour l’instant, observons que par construction, a1=β1(0)¯a^{\prime}_{1}=\overline{\beta_{1}(0)}, de sorte que v(a1)=β1α1=v(a1)v(a^{\prime}_{1})=\beta_{1}\neq\alpha_{1}=v(a_{1}). Similairement, a2f=αk(0)¯a^{\prime}_{2f}=\overline{\alpha^{\prime}_{k}(0)}, de sorte que v(a2f)=αkβk=v(a2f)v(a^{\prime}_{2f})=\alpha_{k}\neq\beta_{k}=v(a_{2f}). Finalement, alors que deux côtés consécutifs (am,am+1)(a_{m},a_{m+1}) sont d’un des trois types (αj,βj)(\alpha_{j},\beta_{j}), (βj,αj)(\beta_{j},\alpha_{j}) ou (βj,αj+1)(\beta_{j},\alpha_{j+1}) (avec jkj\neq k dans cette dernière possibilité), deux côtés consécutifs (am,am+1)(a^{\prime}_{m},a^{\prime}_{m+1}) sont d’un des trois types (βj,βj+1)(\beta_{j},\beta_{j+1}) (où k+1:=1k+1:=1), (αj,αj+1)(\alpha_{j},\alpha_{j+1}) (où k+1:=1k+1:=1) ou (βk,α1)(\beta_{k},\alpha_{1}). Il est donc impossible d’avoir ϕ(m+1)=ϕ(m)+1\phi(m+1)=\phi(m)+1.

Étape 4 : Soient v𝒮(KS)v\in\mathcal{S}(K_{S}) et qq un coin de Π\Pi tel que v=v(q)v=v(q). Il nous reste à vérifier que tout autre coin qq^{\prime} vérifiant v=v(q)v=v(q^{\prime}) est identifié à qq dans le quotient. Pour ce faire, il suffit de vérifier qu’ensemble, les chaînes débutant par qq font intervenir tous les côtés αj(v)\alpha_{j}(v) et βj(v)\beta_{j}(v).

Cas v=0v=0. Sans perte de généralité, supposons que q4j3:=qq_{4j-3}:=q débute βj(0)¯\overline{\beta_{j}(0)}. (L’intérêt de débuter l’étiquettage de la chaîne de coins avec l’indice 4j34j-3 se trouve dans un argument de récurrence.) Donc q4j3q_{4j-3} est identifié au coin q4j2q_{4j-2} qui débute βj(0)\beta_{j}(0) ; puisqu’il s’agit d’un côté ama_{m} avec mm pair, q4j2q_{4j-2} termine le côté αj(0)\alpha^{\prime}_{j}(0) (qui appartient aussi à Πj\Pi_{j}). Donc q4j2q_{4j-2} est identifié au coin q4j1q_{4j-1} qui termine αj(0)¯\overline{\alpha^{\prime}_{j}(0)}.

  • \bullet

    Si 1j<k1\leq j<k, alors q4j1p2f+1q_{4j-1}\neq p^{\prime}_{2f+1}. Donc q4j1q_{4j-1} débute le côté αj+1(0)¯\overline{\alpha_{j+1}(0)}. Ainsi, q4j1q_{4j-1} est identifié au coin q4jq_{4j} qui débute αj+1(0)\alpha_{j+1}(0), c’est-à-dire que q4jq_{4j} est le coin inférieur gauche p2Sj+1p_{2Sj+1} de Πj+1\Pi_{j+1}. Puisque j+12j+1\geq 2, q4jq_{4j} termine βj(0)\beta^{\prime}_{j}(0) ; q4jq_{4j} s’identifie donc au coin q4j+1=q4(j+1)3q_{4j+1}=q_{4(j+1)-3} qui termine βj(0)¯\overline{\beta^{\prime}_{j}(0)} et qui débute le côté βj+1(0)¯\overline{\beta_{j+1}(0)}. Une récurrence sur 1j<k1\leq j<k est alors clairement possible.

  • \bullet

    Si j=kj=k, alors q4k1=p2f+1q_{4k-1}=p^{\prime}_{2f+1} est le coin supérieur droit de Π\Pi. Ainsi, q4k1q_{4k-1} est identifié au coin inférieur droit de Π\Pi, q4k=p2f+1q_{4k}=p_{2f+1}, qui termine βk(0)\beta^{\prime}_{k}(0). En retour, q4kq_{4k} est identifié au coin q4k+1q_{4k+1} qui termine βk(0)¯\overline{\beta^{\prime}_{k}(0)}, c’est-à-dire au coin milieu q4k+1=pf+1q_{4k+1}=p^{\prime}_{f+1}, qui débute α1(0)¯\overline{\alpha_{1}(0)}. Donc q4k+1q_{4k+1} est identifié au coin q4k+2q_{4k+2} qui débute α1(0)\alpha_{1}(0), c’est-à-dire que q4k+2=p1q_{4k+2}=p_{1} est le coin inférieur gauche de Π\Pi. Ce coin est ainsi identifié au coin q1=p1q_{1}=p^{\prime}_{1} qui débute β1(0)¯\overline{\beta_{1}(0)}.

Par inspection, nous voyons que tous les αj(0)\alpha_{j}(0) et tous les βj(0)\beta_{j}(0) interviennent dans la chaîne précédente. Tous les coins de Π\Pi appartenant à v1(0)v^{-1}(0) apparaissent donc dans la chaîne ci-dessus et ils sont ainsi tous identifiés dans le quotient.

Cas v0v\neq 0. C’est précisément ici que l’hypothèse « kk impair » sera utilisée. Soit q1=qq_{1}=q qui termine βk(v)¯\overline{\beta^{\prime}_{k}(v)}. Alors q1q_{1} est identifié au coin q2q_{2} qui termine βk(v)\beta^{\prime}_{k}(v) et qui débute αk(v)\alpha_{k}(v) (puisque v0v\neq 0). Donc q2q_{2} est identifié au coin q3q_{3} qui débute αk(v)¯\overline{\alpha_{k}(v)}. Encore du fait que v0v\neq 0, q3q_{3} termine αk1(v)¯\overline{\alpha^{\prime}_{k-1}(v)} (où nous définissons l’indice 0:=k0:=k) et est donc identifié au coin q4q_{4} qui termine αk1(v)\alpha^{\prime}_{k-1}(v) et débute βk1(v)\beta_{k-1}(v). Ainsi, q4q_{4} est identifié au coin q5q_{5} qui débute βk1(v)¯\overline{\beta_{k-1}(v)}.

Si k=1k=1, alors q5q_{5} débute β1(v)¯\overline{\beta_{1}(v)} et termine β1(v)¯\overline{\beta^{\prime}_{1}(v)}. Bref, q1=q5q_{1}=q_{5}. Dans ce cas, puisque α1(v)\alpha_{1}(v) et β1(v)\beta_{1}(v) ont été impliqués, tous les coins de valuation vv apparaissent dans la chaîne ci-dessus et sont ainsi tous identifiés dans le quotient.

Si k=2l+1k=2l+1 avec l1l\geq 1, alors du fait que v0v\neq 0, βk1(v)¯\overline{\beta_{k-1}(v)} est immédiatement précédé de βk2(v)¯\overline{\beta^{\prime}_{k-2}(v)}. Puisque k2k mod kk-2\not\equiv k\mbox{ mod }k, ce côté diffère de βk(v)¯\overline{\beta^{\prime}_{k}(v)}. Bref, q5q1q_{5}\neq q_{1} et q5q_{5} est identifié au coin q6q_{6} qui termine βk2(v)\beta^{\prime}_{k-2}(v). Puisque v0v\neq 0, q6q_{6} débute αk2(v)\alpha_{k-2}(v) et s’identifie au coin q7q_{7} qui débute αk2(v)¯\overline{\alpha_{k-2}(v)}. Encore parce que v0v\neq 0, q7q_{7} termine αk3(v)¯\overline{\alpha^{\prime}_{k-3}(v)} et s’identifie donc au coin q8q_{8} qui termine αk3(v)\alpha^{\prime}_{k-3}(v) et qui débute βk3(v)\beta_{k-3}(v). Donc q8q_{8} est identifié au coin q9q_{9} qui débute βk3(v)¯\overline{\beta_{k-3}(v)}.

En fait, par récurrence sur l’argument du dernier paragraphe, pour tout 1ml1\leq m\leq l, le coin q5q_{5} s’identifie au coin q2+4mq_{2+4m} qui débute αk2m(v)\alpha_{k-2m}(v), au coin q3+4mq_{3+4m} qui débute αk2m(v)¯\overline{\alpha_{k-2m}(v)}, au coin q4+4mq_{4+4m} qui débute βk2m1(v)\beta_{k-2m-1}(v) et au coin q5+4mq_{5+4m} qui débute βk2m1(v)¯\overline{\beta_{k-2m-1}(v)}. Puisque k2mk mod kk-2m\not\equiv k\mbox{ mod }k, tous ces coins et ces côtés sont distincts. Notons qu’à ce point-ci, tous les αj(v)\alpha_{j}(v) avec jj impair et tous les βj(v)\beta_{j}(v) avec jj pair sont intervenus.

Nous aboutissons alors au coin q5+4lq_{5+4l} qui débute βk(v)¯\overline{\beta_{k}(v)} et qui termine βk1(v)¯\overline{\beta^{\prime}_{k-1}(v)}. Par récurrence sur 0ml10\leq m\leq l-1, nous voyons donc que ce coin est identifié au coin q6+4(l+m)q_{6+4(l+m)} qui termine βk2m1(v)\beta^{\prime}_{k-2m-1}(v) et qui débute αk2m1(v)\alpha_{k-2m-1}(v), qui lui s’identifie au coin q7+4(l+m)q_{7+4(l+m)} qui débute αk2m1(v)¯\overline{\alpha_{k-2m-1}(v)} et qui termine αk2m2(v)¯\overline{\alpha^{\prime}_{k-2m-2}(v)}, qui lui s’identifie au coin q8+4(l+m)q_{8+4(l+m)} qui termine αk2m2(v)\alpha^{\prime}_{k-2m-2}(v) et qui débute βk2m2(v)\beta_{k-2m-2}(v), qui lui s’identifie au coin q9+4(l+m)q_{9+4(l+m)} qui débute βk2m2(v)¯\overline{\beta_{k-2m-2}(v)}.

Pour m=l1m=l-1, nous aboutissons au coin q5+8lq_{5+8l} qui débute β1(v)¯\overline{\beta_{1}(v)} et qui termine donc βk(v)¯\overline{\beta^{\prime}_{k}(v)}. Bref, q1=q5+8lq_{1}=q_{5+8l}. Observons que tous les αj(v)\alpha_{j}(v) avec jj pair et tous les βj(v)\beta_{j}(v) avec jj impair sont apparus lors de cette deuxième récurrence. Donc tous les coins de valuation vv sont identifiés dans le quotient.

7. 1.14

Nous allons montrer que pour tout genre g1g\geq 1, il existe un graphe GgΣgG_{g}\subset\Sigma_{g} cellulaire avec MC qui satisfait Vr(Gg)6g+o(g)V_{r}(G_{g})\geq\sqrt{6g}+o(\sqrt{g}).

Tout d’abord, écrivons 𝒢:={g=g(S):=(S1)(S3)/6|S𝔖}\mathcal{G}:=\{g=g(S):=(S-1)(S-3)/6\,|\,S\in\mathfrak{S}\}

𝔖:={S|S premier,S7 mod 12}.\mathfrak{S}:=\left\{S\in\mathbb{N}\,|\,S\mbox{ premier},\,S\equiv 7\mbox{ mod }12\right\}\,.

Le premier élément de 𝒢\mathcal{G} est g=4g=4. Dans ce qui suit, nous aurons besoin du contrôle suivant sur les écarts entre des éléments suffisamment grands de 𝒢\mathcal{G}.

Lemme 7.1.

Il existe g710g_{*}\geq 7^{10} tel que pour tout g𝒢g^{\prime}\in\mathcal{G} tel que g>gg^{\prime}>g_{*}, il existe g′′𝒢g^{\prime\prime}\in\mathcal{G}_{*} tel que g<g′′<g+(g)9/10g^{\prime}<g^{\prime\prime}<g^{\prime}+(g^{\prime})^{9/10}.

Proof.

Le fait suivant est un corollaire d’un théorème de Baker–Harman–Pintz [BHP, Theorem 3(I)] sur la répartition des nombres premiers appartenant à une classe de congruence :

Soient 1a<q1\leq a<q deux entiers copremiers. Il existe un réel xx_{*} tel que pour tout xxx\geq x_{*}, il existe un nombre premier pa mod qp\equiv a\mbox{ mod }q entre xx et x+x3/5x+x^{3/5}.

Pour q=12q=12 et a=7a=7, ceci implique qu’il existe un entier SS_{*} tel que pour tout entier SSS^{\prime}\geq S_{*}, il existe S′′𝔖S^{\prime\prime}\in\mathfrak{S} tel que 0s:=S′′S(S)3/50\leq s:=S^{\prime\prime}-S^{\prime}\leq(S^{\prime})^{3/5}. Si S𝔖S^{\prime}\in\mathfrak{S}, considérons les éléments g:=g(S)g^{\prime}:=g(S^{\prime}) et g′′:=g(S′′)g^{\prime\prime}:=g(S^{\prime\prime}) dans 𝒢\mathcal{G} et posons h:=g′′gh:=g^{\prime\prime}-g^{\prime}. Nous estimons

h\displaystyle h =16[(S′′2)2(S2)2]=16(2(S2)+s)s12Ss12(S)8/5.\displaystyle=\frac{1}{6}\left[(S^{\prime\prime}-2)^{2}-(S^{\prime}-2)^{2}\right]=\frac{1}{6}(2(S^{\prime}-2)+s)s\leq\frac{1}{2}S^{\prime}s\leq\frac{1}{2}(S^{\prime})^{8/5}\,.

Quitte à prendre g710g_{*}\geq 7^{10}, alors S=2+6g+13+6g24gS^{\prime}=2+\sqrt{6g^{\prime}+1}\leq 3+\sqrt{6g^{\prime}}\leq\sqrt{24g^{\prime}} et

h\displaystyle h 12(24g)4/57(g)4/5(g)9/10.\displaystyle\leq\frac{1}{2}(24g^{\prime})^{4/5}\leq 7(g^{\prime})^{4/5}\leq(g^{\prime})^{9/10}\,.

\square

Fixons maintenant pour de bon un gg_{*} dont l’existence est attestée par le 7.1 et dénotons par 𝒢\mathcal{G}_{*} l’ensemble des g𝒢g\in\mathcal{G} tels que g>gg>g_{*}.

Définissons les graphes GgG_{g}. Nous définissons d’abord GgG_{g} pour g𝒢g\in\mathcal{G} en notant que le 1.12(b) a établi que Vc(g)=1+6g+1=6g+o(g)V_{c}(g)=1+\sqrt{6g+1}=\sqrt{6g}+o(\sqrt{g}) pour tout g𝒢g\in\mathcal{G}  ; pour g𝒢g\in\mathcal{G}, nous choisissons GgΣgG_{g}\subset\Sigma_{g} comme étant un graphe cellulaire avec MC qui réalise Vc(g)V_{c}(g). Ensuite, nous définissons GgG_{g} pour 1gg1\leq g\leq g_{*}, g𝒢g\not\in\mathcal{G} comme suit : par la 5.3 il existe une constante 0<C<10<C_{*}<1 telle que pour tout 1gg1\leq g\leq g_{*}, il existe un graphe HgΣgH_{g}\subset\Sigma_{g} cellulaire avec MC tel que Vr(Hg)>C6gV_{r}(H_{g})>C_{*}\sqrt{6g}, et donc nous prenons Gg:=HgG_{g}:=H_{g} pour 1gg1\leq g\leq g_{*}, g𝒢g\not\in\mathcal{G}.

Finalement, pour g𝒢g\not\in\mathcal{G} avec g>gg>g_{*}, on définit GgG_{g} récursivement par la construction de la somme connexe. C’est-à-dire, pour un tel gg, nous laissons g𝒢g^{\prime}\in\mathcal{G} être le plus grand élément dans 𝒢\mathcal{G} tel que g<gg^{\prime}<g et posons Gg:=Gg#GhG_{g}:=G_{g^{\prime}}\#G_{h}h:=ggh:=g-g^{\prime}. Notons que le 7.1 implique que h<(g)9/10<gh<(g^{\prime})^{9/10}<g^{\prime} et donc cette définition récursive de GgG_{g} pour g>Gg>G_{*}, g𝒢g\not\in\mathcal{G} est bien définie. Le cœur de la démonstration consiste à montrer que ces graphes satisfont Vr(Gg)6g+o(g)V_{r}(G_{g})\geq\sqrt{6g}+o(\sqrt{g}).

Nous affirmons qu’il existe D>6D>6 tel que pour tout k1k\geq 1,

S(Gk)Dk.S(G_{k})\leq D\sqrt{k}\,.

Il convient de souligner que cette égalité tient si k𝒢k\in\mathcal{G}, car dans ce cas (6.1) S(Gk)=2+6k+1<24kS(G_{k})=2+\sqrt{6k+1}<\sqrt{24k}. Il est aussi clair qu’une telle inégalité tient pour kgk\leq g_{*}. Soit g>g710g>g_{*}\geq 7^{10} avec g𝒢g\not\in\mathcal{G} et supposons que l’inégalité ait été établie pour tout k<gk<g. Dénotons par gg^{\prime} le plus grand élément de 𝒢\mathcal{G} qui soit inférieur à gg et h:=ggh:=g-g^{\prime}. Posons aussi G=GgG^{\prime}=G_{g^{\prime}}, H=GhH=G_{h} et G=Gg=G#HG=G_{g}=G\#H. En vertu du 7.1, nous avons h<g9/10h<g^{9/10}, de sorte que :

S(G)\displaystyle S(G) S(G)+S(H)24g+Dh\displaystyle\leq S(G^{\prime})+S(H)\leq\sqrt{24g^{\prime}}+D\sqrt{h}
24g+Dg9/20\displaystyle\leq\sqrt{24g}+Dg^{9/20}
(246+71)Dg<Dg.\displaystyle\leq\left(\dfrac{\sqrt{24}}{6}+7^{-1}\right)\,D\sqrt{g}<D\sqrt{g}\,.

Nous affirmons enfin qu’il existe DD+1D^{\prime}\geq D+1 tel que pour tout k1k\geq 1,

Vr(Gk)6kDk9/20.V_{r}(G_{k})\geq\sqrt{6k}-D^{\prime}k^{9/20}\,.

Cette inégalité tient pour k𝒢k\in\mathcal{G}, car alors Vr(Gk)=b(k)>6kV_{r}(G_{k})=b(k)>\sqrt{6k} en vertu du 1.12(b). Une telle inégalité tient clairement pour kgk\leq g_{*}. Soit g>g710g>g_{*}\geq 7^{10} qui n’est pas dans 𝒢\mathcal{G} et supposons que nous ayons montré l’inégalité pour tout k<gk<g. Avec les mêmes notations que précédemment, en ayant recours à l’identité (#\#) concernant Vr(G)V_{r}(G), nous calculons

Vr(G)\displaystyle V_{r}(G) Vr(G)S(G)S(G)+S(H)+Vr(H)S(H)S(G)+S(H)Vr(G)S(G)S(G)+S(H)\displaystyle\geq V_{r}(G)\dfrac{S(G^{\prime})}{S(G^{\prime})+S(H)}+V_{r}(H)\dfrac{S(H)}{S(G^{\prime})+S(H)}\geq V_{r}(G^{\prime})\dfrac{S(G^{\prime})}{S(G^{\prime})+S(H)}
6g[(6g6g)+(6gVr(G))+Vr(G)S(H)S(G)].\displaystyle\geq\sqrt{6g}-\left[(\sqrt{6g}-\sqrt{6g^{\prime}})+(\sqrt{6g^{\prime}}-V_{r}(G^{\prime}))+V_{r}(G^{\prime})\dfrac{S(H)}{S(G^{\prime})}\right]\,.

Nous avons déjà noté que 6gVr(G)<0\sqrt{6g^{\prime}}-V_{r}(G^{\prime})<0. Puisque 1+x1x/2\sqrt{1+x}-1\leq x/2 pour x0x\geq 0 et puisque h(g)9/10h\leq(g^{\prime})^{9/10}, nous estimons

6g6g\displaystyle\sqrt{6g}-\sqrt{6g^{\prime}} 6gh2g32(g)2/5g9/20.\displaystyle\leq\sqrt{6g^{\prime}}\dfrac{h}{2g^{\prime}}\leq\sqrt{\frac{3}{2}}(g^{\prime})^{2/5}\leq g^{9/20}\,.

Finalement, puisque Vr(G)=S(G)1V_{r}(G^{\prime})=S(G^{\prime})-1 (6.1), nous calculons

Vr(G)S(H)S(G)\displaystyle V_{r}(G^{\prime})\dfrac{S(H)}{S(G^{\prime})} S(H)DhDg9/20.\displaystyle\leq S(H)\leq D\sqrt{h}\leq Dg^{9/20}\,.

Il résulte de tout ceci que

Vr(G)\displaystyle V_{r}(G) 6g(D+1)g9/206gDg9/20.\displaystyle\geq\sqrt{6g}-(D+1)g^{9/20}\geq\sqrt{6g}-D^{\prime}g^{9/20}\,.

Appendix A Invariants B(g)B(g) et C(g)C(g)

Définition A.1.

Soit Σg\Sigma_{g} une surface orientable fermée de genre gg. Définissons B(g)B(g) comme le maximum d’éléments que peut contenir une famille de lacets non orientés plongés, tous disjoints deux à deux, et dont les classes d’homotopie libres (sans point de base) non orientées sont toutes différentes, et différentes de la classe triviale.

Définissons C(g)C(g), pour un point de base pΣgp\in\Sigma_{g} arbitraire, comme le maximum d’éléments que peut contenir une famille de lacets non orientés plongés tous basés en pp, disjoints deux à deux hors de pp, et qui représentent des classes différentes en homotopie non orientée basée en pp, et différentes de la classe triviale.

Définissons enfin C2(g)C_{2}(g), pour deux points de base arbitraires pp et pp^{\prime} dans Σg\Sigma_{g}, comme le maximum d’éléments que peut contenir une famille de courbes non orientées plongées reliant pp à pp^{\prime}, deux à deux disjointes, et qui représentent des classes différentes en homotopie non orientée à bouts pp et pp^{\prime} fixés.

Proposition A.2.

B(g)=3g3B(g)=3g-3 pour g>1g>1 et vaut 0 en genre 0 et 11 en genre 11. Et C(g)6g3C(g)\leq 6g-3 pour g>1g>1, vaut 0 en genre g=0g=0 et 33 en genre 11. Enfin C2(g)=C(g)+1C_{2}(g)=C(g)+1.

Le résultat pour B(g)B(g) est folklorique (nous en rappelons la preuve plus bas). Le fait que C2(g)=C(g)+1C_{2}(g)=C(g)+1 est évident, il suffit de contracter n’importe quelle courbe entre pp et pp^{\prime}.

Proof.

Les cas particuliers en genre 0 et 11 sont évidents.

Commençons par B(g)B(g) qui est un résultat classique : si une famille maximale est donnée, coupons Σg\Sigma_{g} le long des lacets, on obtient des surfaces S1,S2,,SkS_{1},S_{2},\ldots,S_{k}. Si la caractérisque d’Euler555Qu’il faudrait d’ailleurs appeler la caractéristique de Descartes-Euler, car Descartes fut le premier à énoncer la formule de la caractéristique en genre 0 affirmant qu’elle était indépendante de la décomposition de la sphère en polygones. Euler en a fait la démonstration. de SiS_{i} est positive ou nulle, c’est un disque ou un anneau, ce qui contredit l’hypothèse d’indépendance des classes. Si elle est plus petite ou égale à 2-2, on peut trouver un lacet simple dans SiS_{i} qui n’est pas librement homotope à son bord, ce qui contredit la maximalité. Si la caractéristique est 1-1, SiS_{i} est soit un tore avec un trou, soit une paire de pantalons (une sphère avec trois trous). Le cas du tore troué est exclu car il contient un lacet qui n’est pas homotope au bord. Donc chaque surface SiS_{i} est une paire de pantalons et il y a exactement 2g22g-2 telles paires sur une surface de genre gg. Puisque chaque lacet est inclus dans deux des bords des SiS_{i}, il s’ensuit que B(g)=(1/2)(3(2g2))=3g3B(g)=(1/2)(3(2g-2))=3g-3.

Abordons maintenant la preuve de l’inégalité C(g)6g3C(g)\leq 6g-3 en genre supérieur à 0. D’abord une définition :

Définition A.3.

Soit Σg\Sigma_{g} une surface orientable fermée de genre gg. Soit pΣgp\in\Sigma_{g} un point de base arbitraire. Soient aa et bb deux lacets plongés dans Σg\Sigma_{g}, basés en pp, disjoints hors du point pp. On dit que la paire (a,b)(a,b) est une paire duale de Poincaré si [a][b]=±1[a]\cdot[b]=\pm 1, lorsqu’on munit aa et bb d’orientations arbitraires, et où [][\cdot] est l’image par l’homomorphisme de Hurewicz de π1(Σg)H1(Σg;)\pi_{1}(\Sigma_{g})\to H_{1}(\Sigma_{g};{\mathbb{Z}}).

Pour toute telle paire duale de Poincaré, on peut trouver un homéomorphisme de Σg\Sigma_{g} sur lui-même qui envoie la paire sur une paire standard (ai,bi)(a_{i},b_{i}).

Supposons d’abord que la famille maximale \mathcal{F} réalisant C(g)C(g) soit entièrement formée de paires duales de Poincaré. On coupe la surface le long de ces lacets, et on obtient une sphère avec un trou, dont le bord est un 4g4g-polygone PP. C’est donc la fermeture convexe de 4g4g points dans le plan. Par identification des côtés de PP par paires duales, on a 2g2g lacets. Par le lemme précédent, on peut ajouter au maximum 4g34g-3 arêtes. Donc, dans ce cas, on obtient pour C(g)C(g) la valeur 2g+4g3=6g32g+4g-3=6g-3.

A l’opposé, s’il n’y avait dans la famille maximale \mathcal{F} aucune paire duale, on obtiendrait 3g33g-3 lacets. En effet, la non-existence des paires duales de Poincaré signifie que, dans un petit disque près de pp, les segments incidents à pp sont suivant l’ordre anti-horaire, de la forme (en notant aia_{i} et aia_{i}^{\prime} les deux bouts d’un même lacet) :

ai1,ai2,aim1,aim,aim,aim1,,ai2,ai1.a_{i_{1}},a_{i_{2}},\ldots a_{i_{m-1}},a_{i_{m}},a_{i_{m}}^{\prime},a_{i_{m-1}}^{\prime},\ldots,a_{i_{2}}^{\prime},a_{i_{1}}^{\prime}.

C’est un ensemble emboité, et l’on peut donc retracter chaque lacet hors de pp. On tombe alors dans la situation du calcul de B(g), et on obtient 3g33g-3. Comme cette formule n’est pas valable pour le tore, il est préférable dans la suite de prendre B(g)3g2B(g)\leq 3g-2 qui est valable pour tout g>0g>0.

Voyons enfin les cas intermédiaires : on suppose qu’il existe sur la surface de genre gg exactement ggg-g^{\prime} paires duales dans une famille maximale pour C(g)C(g). En coupant la surface le long de ces lacets, on obtient une surface Σ\Sigma de genre gg^{\prime} avec un trou dont le bord est un 4(gg)4(g-g^{\prime})-polygone PP avec les identifications usuelles sur les arêtes qui donnent déjà 2(gg)2(g-g^{\prime}) lacets. La formule exacte est alors C(g)=6g3g3C(g)=6g-3g^{\prime}-3 dans ce cas (quand g=0g^{\prime}=0, on retrouve la formule 6g36g-3 et quand g=gg^{\prime}=g, on retrouve 3g33g-3). Comme il suffit de démonter l’inégalité C(g)6g3g3C(g)\leq 6g-3g^{\prime}-3, on procède de la façon suivante. Aux 2(gg)2(g-g^{\prime}) lacets, on ajoute les 4(gg)14(g-g^{\prime})-1 lacets locaux autour de PP qui relient un sommet pp de PP aux autres. Il reste alors les lacets de Σ\Sigma basés en pp. Mais comme il n’existe plus de paire Poincaré duale, ces lacets se rétractent dans Σ\Sigma hors de pp et constituent une famille maximale pour Σg\Sigma_{g^{\prime}} dont le nombre est B(g)3g2B(g)\leq 3g-2. La somme donne C(g)2(gg)+4(gg)1+3g2=6g3g3C(g)\leq 2(g-g^{\prime})+4(g-g^{\prime})-1+3g^{\prime}-2=6g-3g^{\prime}-3. Le maximum de cette borne supérieure sur 0gg0\leq g^{\prime}\leq g est 6g36g-3.   \square

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